Pour faire de bons films, il faut souvent être un bon con. C’est du moins la conclusion à laquelle on arrive en voyant la liste des réalisateurs qui sont réputés les plus insupportables de tous les temps sur leurs tournages. On parle pas de Michael Bay, mais de types qui ont réalisé des chefs d’oeuvre. De là à dire que tyrannie = obsession = génie, il n’y a qu’un pas, mais faut pas être méchant avec les gens, quelle que soit la raison.
Abdellatif Kechiche
L’histoire a fait les grands titres de la presse peu après le triomphe de La vie d’Adèle. Kechiche s’est comporté comme une horreur sur le tournage, poussant Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos à bout, les obligeant à tourner la scène de sexe lesbien pendant 10 jours, usant de manipulation pour obtenir ce qu’il voulait…
Henri-Georges Clouzot
Méticuleux et totalement dingue, Clouzot a réussi à foutre Reggiani et Schneider en dépression sur le tournage de l’Enfer. Toujours insatisfait de ce qu’il faisait, en proie à des délires visuels sur les scènes en couleur, il faisait jouer et rejouer et rerejouer encore les mêmes scènes à ses comédiens, jusqu’à ce que Reggiani craque, lui foute un poing dans la gueule et quitte le tournage. Au bout du bout, le film n’a jamais été achevé et son scénario a finalement été mis en scène par Chabrol, plus simple à vivre.
Wong Kar-wai
Sur le tournage de 2046, son film sans doute le plus conceptuel (et à mon sens le plus beau), le scénario évoluait en permanence. Le réalisateur arrivait parfois sur le plateau simplement pour réfléchir. Imaginez un peu les comédiens : maquillage, arrivée à l’heure, attente… Rien. Wong Kar-wai réfléchissait. Il obligeait également les comédiens à tourner des séquences entières qui, au final, ne figureraient pas même dans le film parce qu’il avait changé d’idée. Ou comment ne pas savoir du tout où on s’embarque. Les acteurs se sont brouillés avec lui à l’issue de ce tournage.
Stanley Kubrick
Kubrick torturait ses acteurs, et surtout quand ils étaient pas très armés pour faire face à ce genre de comportement. Shelley Duvall, qui joue la mère dans Shining, en a fait les frais : pour la mettre dans le rôle, Kubrick a passé l’intégralité du tournage à lui hurler dessus, à la brimer, à la rabaisser, tout le temps. Et à lui faire faire des centaines de prises pour un plan tout simple. Duvall en a perdu ses cheveux (mais sa performance est excellente, bravo l’enflure).
Alfred Hitchcock
Est-ce de la tyrannie ou du Weinsteinisme ? Hitchcock avait un comportement plus que limite avec les femmes. Sur le tournage des Oiseaux, Tippi Hedren a subi un véritable harcèlement sexuel et moral de la part de Hitchcock jusqu’à réussir à le faire comprendre que NON, ils ne coucheraient pas ensemble. Réponse d’Hitchcock ? OK, mais dans ce cas tu ne vas pas te faire attaquer par des oiseaux mécaniques dans la fameuse scène, mais par de vrais oiseaux, histoire que ce soit l’horreur. 5 jours de tournage, le visage de l’actrice griffé de partout, direction l’hôpital.
Francis Ford Coppola
C’est notamment sur le tournage d’Apocalypse Now que la folie de Coppola s’est révélée. Les emmerdes de tournages sont des tartes à la crème de la cinéphilie et on ne va pas toutes les détailler, mais il est à noter que le réalisateur a poussé Martin Sheen (après avoir dégagé Harvey Keitel initialement choisi) à se bourrer la gueule en permanence et jusqu’à faire une crise cardiaque pour correspondre au rôle et adopte la bonne expression lors de la scène d’ouverture dans la chambre d’hôtel. Et Coppola, au mépris de toute logique, de ne pas informer la production de la crise cardiaque de son acteur principal pour ne pas perdre ses financements.
Maurice Pialat
Bourru et désagréable, tout le temps à remettre en cause le talent de ses comédiens, Pialat était détesté et talentueux. Sur le tournage de Police, Anconina ne cessait d’être rabaissé par Pialat qui lui disait qu’il était nul. Et il ne rétropédale que lorsqu’Anconina, poussé à bout, quitte le plateau. Avec Depardieu, tout était électrique aussi, coups pris et coups rendus. Quant à Jean Yanne, son acteur principal dans Nous ne vieillirons pas ensemble, il a fait le récit d’un tournage insupportable et d’un réalisateur à chier, incapable de donner une juste direction d’acteurs et obnubilé par lui-même.
William Friedkin
Sur le tournage de l’Exorciste, Friedkin avait une bonne technique pour transmettre la terreur dans le regard des comédiens : il tirait avec un flingue. Par exemple, à un moment de grand silence angoissant seulement perturbé par une voix de démon, le téléphone sonne et surprend le curé venu pratiquer l’exorciste. Le curé doit vraiment avoir peur. Comment y arriver ? En tirant un coup en l’air, par exemple, sans le prévenir auparavant. Friedkin a aussi giflé un comédien par surprise pour obtenir de lui un effet de tétanie. Enfin, la mère de la petite possédée s’est pété le coccyx après que Friedkin l’a projetée de toute ses forces contre un mur pour créer un effet wahou à la caméra.
Robert Bresson
Connu pour entretenir des relations malsaines avec ses comédiennes, Robert Bresson a notamment tyrannisé Anne Wiazemsky sur le tournage de Au hasard Balthazar, à tel point d’ailleurs que toute l’équipe la surnommait « La petite prisonnière ». Ambiance.
Jean-Pierre Mocky
Pas un rond sur les tournages, tout le monde bourré tout le temps, un scénario en perpétuelle évolution, Mocky qui fait la gueule et qui HURLE. Il hurle. Il hurle sur tout le monde, il engueule tout le monde, il déteste tout le monde. C’est Mocky, que voulez-vous ?
Par contre sur le tournage de T’aime, de Patrick Sébastien, tout s’est bien passé.