Ne la laisse pas tomber, c’est pas si facile, être une femme de dictateur, tu sais, c’est pas si fastoche. Avec Cookie Dingler, ayons une pensée particulière pour le sort de ces pauvres femmes mariées à des dictateurs sanguinaires et qui, aveuglées par l’amour, ne se rendent pas compte de l’horreur qu’ils font subir à leur population. Et puis, à quel moment penser à tout ça entre le shopping à Paris, les rencontres internationales, et l’idéologie orthodoxe à défendre ? Sous un décorum de légèreté soi-disant féminine se cachent en effet souvent des idéologues forcenées, tout aussi sanguinaires que leur mari et tout aussi craintes.
Elena Ceausescu
Surnommée Cruella par la presse occidentale, Elena Ceausescu était une idéologue. Après avoir copieusement menti sur ses diplômes pour faire croire qu’elle était une chimiste émérite, Elena Ceausescu réussit à s’imposer comme la numéro 2 du régime quand son mari, Nicolae, dirige la Roumanie d’une main de fer. On ne repasse pas en détails l’héritage laissé par les époux Ceausescu (génocide, destruction de patrimoine, culte de la personnalité, corruption massive, attaque armée contre le peuple), si ce n’est pour dire qu’Elena Ceausescu y a pris toute sa part,
Elena Ceaucescu, avec ses titres universitaires usurpées, prend notamment la tête de la Commission d’Etat chargée de la santé ; elle supprime le contrôle des naissances et nie, dans les années 1980, l’existence du Sida en Roumanie, alors même que le virus se propage à toute vitesse. Par ailleurs, tandis que la population roumaine s’enfonçait dans la misères, les époux Ceaucescu menaient la grande vie dans un palais immense construit en rasant des quartiers entiers de Bucarest.
Lors de la chute du régime, en 1989, elle est reconnue coupable des chefs d’accusation évoqués plus haut lors d’un simulacre de procès. Elle est immédiatement fusillée, comme son mari.
Simone Gbagbo
Simone Gbagbo est devenue, en 2012, la première femme poursuivie par la Cour pénale internationale pour crimes contre l’humanité. Les accusations de la Cour concernent la crise ivoirienne de 2010-2011, à la suite de l’élection présidentielle ayant opposé son mari, Laurent Gbagbo, à Alassane Ouattara. Pendant les années où son mari dirige la Côte d’Ivoire, entre 2000 et 2011, elle est considérée comme un personnage plus influent que l’ensemble des ministres et incarne la ligne dure du régime. Elle noyaute d’ailleurs le pouvoir en plaçant des proches à tous les postes-clés. Surnommée la dame de fer, ou la dame de sang, elle est jugée proche des escadrons de la mort à l’origine d’une vague d’assassinats d’opposants au régime au début des années 2000.
Simone Gbagbo a été condamnée à 15 ans de prison en 2015 par la justice ivoirienne.
Carmen Franco y Polo
Zinzin zinzin zinzin. Pour Carmen Franco y Polo, il y avait deux choses dans la vie : Dieu et Franco. Et puis un peu les bijoux, aussi, qui lui vaudront son surnom de « La colliers« . Née en 1900, elle se marie à Franco en 1917, prie Dieu, donne naissance à une fille qui épousera un Bourbon, et prie Dieu à nouveau pour que son mari gagne la guerre civile. Une fois que Dieu a exercé son souhait, elle se trimbale, diaphane et un peu débile, à ses côtés dans des réceptions officielles où elle ne comprend rien et où elle gène un peu. Et surtout, elle achète des colliers dès qu’elle peut. Tout le temps. Partout. Pendant que des enfants de fusillés de gauche sont kidnappés et placés dans des familles, elle achète des colliers.
Agathe Habyarimana
Après l’assassinat de son autocrate de mari, en 1994, Agathe Habyarimana a mal pris les choses. Soupçonnée de diriger l’Akazu, regroupant l’entourage du président Habyarimana, elle serait pour la plupart des observateurs directement à l’origine du génocide des Tutsis. Sa position lui permettait en effet d’ordonner le massacre et d’organiser la propagande. Réfugiée en France depuis 1994 (mais non-détentrice du statut de réfugiée), un mandat d’arrêt international a été lancé à son encontre. Elle a été arrêtée en 2010 par les autorités françaises.
Pour mémoire, le génocide rwandais, ce sont 800.000 morts en trois mois. A la machette.
Jewel Taylor
Femme de Charles Taylor, Président du Liberia entre 1997 et 2003, Jewel Taylor participe largement aux massacres perpétrés par son mari. Pendant que Charlie lève des armées d’enfants pour massacrer ses opposants, organise des viols collectifs et tutti quanti, elle se promène sur la scène internationale en faisant des sourires pour faire croire qu’au Liberia, tout est cool. Quand elle n’est pas en visite officielle, Jewel Taylor s’arrange pour prendre la tête de toutes les banques du pays et s’enrichir à mort.
En 2004, après la chute de son mari, elle fait l’objet d’une interdiction de quitter le territoire pour soutien aux atrocités perpétrées par son mari. Acquittée faute de preuve, elle divorce de son mari (lequel, lui, est placé en prison), et se fait élire sénatrice. En 2012, elle propose notamment une loi visant à criminaliser l’homosexualité. Sympatoche.
Lucia Hiriart Pinochet
Complice de l’accession d’Augusto Pinochet au pouvoir, suite au coup d’Etat de 1973, sa femme, Lucia, prend la présidence de CEMA Chili, une institution visant directement les mères du Chili pour diffuser des idées moralisatrices façon travail famille patrie directement au cœur des foyers. Pour cette tâche pas trop contraignantes, on lui donne un salaire pas trop contraint, genre 300.000 dollars par an. Par ailleurs, elle s’occupe de toutes les charges habituellement allouées aux femmes dans les pays tradis tradis, c’est-à-dire les pseudos dispensaires pour les pauvres, tout ça, tout ça. S’attachant à incarner une image catho coincée rangée, Lucia Pinochet se retrouve toutefois au milieu d’un scandale financier, quand on découvre, longtemps après la chute organisée du régime qu’elle est au centre d’un gigantesque système de détournement de fonds et de fraude fiscale. Sans doute pour donner aux pauvres.
Nexhmije Hoxha
Femme du dirigeant communiste albanais Enver Hoxha, Nexhmije se fait remarquer à la fois pour son prénom super difficile à orthographier, mais surtout pour la rigueur de sa lecture du communisme. Ils se rencontrent dans des cercles anti-fascistes et militants pendant la guerre. Alors que son mari prend la tête des opérations en 1941, Nexhmije Hoxha se fait élire députée en 1946 et se spécialise dans les questions de propagandes, de culture et d’éducation. Orthodoxe jusqu’à l’overdose, elle est une idéologue qui veut faire de l’Albanie un modèle exportable à même de concurrencer les immenses puissances communistes que sont Moscou et Pékin. Par son oeuvre de propagande et sa dureté, l’araignée noire, comme on la surnomme, fera planer une menace perpétuelle sur le peuple albanais pendant 40 ans, ordonnant ou cautionnant les massacres, les purges et les arrestations. Lors de son jugement, en 1993, elle sera exemptée de toute accusation d’assassinat ou de torture, bénéficiant ainsi de son immense emprise sur les cercles les plus influents de l’Etat et de la justice. Elle sera finalement condamnée pour détournement de fond et rapidement relâchée.
Imelda Marcos
Epouse de Ferdinand Marcos, président des Philippines de 1965 à 1986, Imelda Marcos se pose comme la vraie codirigeante du régime en cumulant les titres à rallonge. Reine de beauté dans sa jeunesse, elle met à profit son charme pour prendre la main sur les relations internationales des Philippines et multiplie les voyages à l’étranger, au cours desquels elle dépense des fortunes incommensurables en paires d’escarpins et en bijoux. Parmi les faits notables qui lui sont imputables, il y a la construction d’un palais du cinéma à Manille dans l’idée d’organiser un festival concurrent à celui de Cannes ; l’effondrement de l’édifice provoque la mort de 169 ouvriers, sur les corps desquels on coule une énorme dalle de béton pour ne pas retarder les travaux, sans même procéder à des recherches pour savoir s’il reste des survivants. Sympa. Elle s’exile à Hawaï, est jugée et acquittée aux Etats-Unis, revient aux Philippines et reprend la politique. Peinarde.
Leïla Ben Ali
Le coeur coeur de Leïla Ben Ali, c’est la famille. Leïla Trabelsi, épouse du dirigeant tunisien, place l’ensemble de son clan à aux postes-clés du pouvoir politique et économique. La famille récupère quelque chose comme 40% de l’économie du pays, confisque les terres, les entreprises, tout. C’est sur cette dérive totalement dingue que se cristallise le craquage des Tunisiens, plus encore que sur la dureté du régime politique. Les élections de 2009, truquées, donnent à Leïla l’occasion de briller encore plus en donnant des discours à la place de son mari. C’est le début du Printemps arabe. En 2011, le couple est renversé. On découvre alors l’étendue des richesses accumulées par le clan Trabelsi au fil des années. Leïla Ben Ali est condamnée à 35 ans de prison par la justice tunisienne mais se réfugie dans un palais d’Arabie Saoudite pour échapper à sa peine.
Asma al-Assad
Alors que son mari massacre son pays depuis bientôt 6 ans avec la complicité de la Russie et d’une certaine façon de toute la communauté internationale, Asma al-Assad ne se pose pas de questions. Des fuites prouvent qu’elle passe le plus clair de son temps à dépenser du blé sur Internet. Elle achète de la musique sur iTunes, dépense des fortunes pour des chandeliers à Londres ou à Paris et s’est même acheté du matos à fondue sur Amazon. Tranks.
A la fraîche, un petit Daïquiri avec vue sur charnier.
Source : L’excellent livre de Diane Ducret, Femmes de dictateurs