Quand il s’agit de faire un film, on distingue plusieurs écoles : l’école Charles Laughton, réalisateur d’un seul et unique film, La nuit du chasseur, devenu un classique absolu et pas la peine d’en réaliser un deuxième, tout est dit ; l’école Patrick Sébastien, réalisateur d’un seul et unique film devenu malgré lui un classique du rire et pas la peine d’en réaliser un deuxième, merci, ça va ; l’école Spielberg, réalisateur de mille films avec une savoureuse alternance de classiques et de bouses ; et puis l’école Kubrick, qui n’a fait que des classiques.
Stanley Kubrick
Je n’ai pas vu Fear and desire et le Baiser du tueur. Mais L’Ultime razzia, Spartacus, Les Sentiers de la gloire, Lolita, Docteur Folamour, 2001, Orange mécanique, Barry Lyndon, Orange mécanique, Full Metal Jacket et Eyes Wide Shut sont TOUS d’excellents films, même si le dernier vaut sans doute un peu moins que les autres. Ce qui est dingue, en plus, c’est qu’il ne s’agit pas de l’exploration obsessionnelle d’un seul et même thème mais bien d’un résumé cinématographique hyper hétéroclite.
Paul Thomas Anderson
Hard Eight, Boogie Nights, Magnolia, Punch Drunk Love, There will be blood, The Master et Inherent Vice sont tous de très bonne qualité. Aucune bouse. Pour l’ancien assistant de Robert Altman, très grand réalisateur à la régularité moins évidente, c’est quand même une vraie prouesse. De l’avantage de tourner peu.
Jean-Pierre Melville
Toute la filmographie de Melville est bien, et jusqu’à Un flic, son dernier film largement descendu par la critique à l’époque de sa sortie. Bien sûr, tous ses films ne sont pas égaux (on aurait du mal à maintenir le niveau de l’Armée des ombres, du Cercle rouge ou du Samouraï sur 30 ans), mais rien n’est à jeter.
Henri-Georges Clouzot
Hitchcock français plus régulier que son homologue britannique. Quand Hitchcock se perd, parfois (Mais qui a tué Harry, La Corde, Frenzy), Clouzot, lui, enchaîne les films inoubliables : Le Corbeau, L’Assassin habite au 21, Quai des Orfèvres, Manon, Miquette et sa mère, Le Salaire de la peur, Les Diaboliques, Le mystère Picasso, Les Espions, La Vérité, Les Prisonnières. Tout est génial.
David Lean
Souvent considéré comme un besogneux, un artisan plus qu’un artiste, David Lean a quand même vraiment laissé son empreinte sur l’histoire du cinéma en réalisant toutes les grandes fresques historiques et romanesques des années 40 à 70. A partir d’Oliver Twist, en 48 et jusqu’au triptyque Pont de la rivière Kwaï, Lawrence d’Arabie, Le Docteur Jivago, il n’a fait que des classiques. Sur IMDB, l’intégralité de sa filmographie récolte une note supérieure à 7.
Joseph L. Mankiewicz
Essayez un peu de trouver une bouse dans la filmographie de Mankewicz. Ses œuvres de jeunesse sont extrêmement intéressantes, le segment chef d’oeuvres de sa carrière entamé avec L’Aventure de Madame Muir se poursuit jusqu’à sa mort avec entre autres On murmure dans la ville, Eve, Chaînes conjugales, L’Affaire Cicéron, Blanches colombes et vilains messieurs, Jules César, Cléopâtre, La Comtesse aux pieds nus, Soudain l’été dernier et en feu d’artifice final Le Limier. Et les films que je n’ai pas cités sont presque aussi bien que ces classiques-là.
François Truffaut
On va pas refaire toute la filmographie de Truffaut, mais force est de constater qu’il n’a fait aucun mauvais film, contrairement à Godard. De l’avantage de mourir jeune.
Billy Wilder
D’abord dans le film noir, puis dans la comédie à succès, Billy Wilder a déroulé une filmographie de classiques absolus. Son plus mauvais film doit être Fedora, et c’est un excellent film.
Michael Haneke
On ne crie pas systématiquement au chef d’oeuvre : Caché n’a pas la même ambition que Le Ruban blanc ou Funny Games et la version US de ce dernier film ne vaut certainement pas Amour. Mais y’a-t-il un seul ratage ? Non. Benny’s video est très bien, Le septième continent mortel, La Pianiste marque.
Claude Sautet
De Classe tout risque à Nelly et Monsieur Arnaud, tous ses films sont intelligents. Son moins bon film doit être Garçon !, mais il est tout de même intéressant ; son meilleur, Les choses de la vie, est probablement ce que le cinéma français a fait de plus émouvant au cours des 50 dernières années. Tranquille.
Maïwenn
Qu’on l’aime ou qu’on l’aime pas (oui, vous avez compris, elle m’insupporte), Maïwenn a réalisé 4 films de très bonne qualité. Pardonnez-moi est une prouesse compte tenu de son budget, Le Bal des actrices un objet singulier, Polisse et Mon roi deux excellents films. On est bien obligé de l’admettre.
Xavier Dolan
6 films, 6 réussites. De la même manière que Maïwenn, Dolan est clivant, mais sa filmographie est intelligente et intéressante, d’autant qu’avec Tom à la ferme, par exemple, il est sorti de sa zone de confort en proposant un thriller psychologique. Et puis quand ton moins bon film a le Grand Prix à Cannes, c’est que ça doit pas être si nul.
Nanni Moretti
Ses films d’avant 1990 ne sont pas plus connus que ça, mais ils ont tous un regard singulier sur l’Italie. Ses films d’après 1990 sont pour la plupart des chefs d’œuvre, au premier rang desquels on trouve La chambre du fils, mais aussi Journal intime. C’est toujours bien, Nanni Moretti.
« La régularité, c’est la clé du bonheur ».
Gandhi.