La peinture n’est pas l’apanage des critiques d’art : chacun peut y voir ce qu’il veut et réfuter les analyses ronflantes qu’on se tape à grands renforts de mots compliqués utilisés pour faire sérieux. Cela dit, il existe parfois des réalités historiques dont l’analyse ne prend pas toujours compte. Et c’est comme ça que naissent les imbroglios sur des centaines d’années.

Le Cri, d'Edvard Munch

On pense souvent que Le Cri dépeint la détresse d’un mec façon ultra-moderne solitude tout à coup sur un pont. En réalité, il semblerait que Le Cri survienne au moment de l’éruption du volcan Krakatoa, survenue en Indonésie en 1883 ; la couleur du ciel rougeoyant serait influencée par l’éruption et le personnage serait effrayée de l’arrivée soudaine de cette ambiance d’apocalypse.

Crédits photo (Domaine Public) : Edvard Munch

La Duchesse très laide, de Quentin Metsys

Quand on voit ce tableau, la réaction, généralement, est de se dire « putain mais à la Renaissance ils peignaient vraiment des gens immondes quand même et ils comprenaient rien à la perspective bordel. » Pourtant, le tableau est très malin et porte en lui son ironie. Metsys met en réalité en image une description d’Erasme de ces vieilles aristocrates ridicules qui continuent à jouer les coquettes alors qu’elles ressemblent à des tromblons.

Crédits photo (Domaine Public) : Quentin Metsys

Le Déjeuner sur l'herbe, de Manet

Très mal reçue lors de sa présentation au salon des refusés, le déjeuner sur l’herbe passe souvent pour une sorte d’apologie de la bonne vie à la cool : des mecs mangent et ripaillent dans la nature avec une nana à poil dont on imagine qu’elle n’est pas à poil pour rien. En réalité, Manet s’adresse à la peinture mythologique, seule capable d’afficher des femmes nues sans choquer personne, et prépare son linceul en reprenant ses codes pour mieux les ridiculiser.

Crédits photo (Domaine Public) : Édouard Manet

La Persistance de la mémoire, de Dali

Comme souvent avec Dali, la surintellectualisation des choses conduit à des erreurs d’appréciation. Pendant des années, des spécialistes ont loué l’habileté d’un peintre capable de traduire picturalement une métaphore d’un espace-temps dilué et insaisissable en réponse aux théories d’Einstein, alors que Dali s’était contenté de peindre un camembert qui coule et de le transformer en montre parce qu’après tout, c’était rond aussi.

Crédits photo : : DR

Iris noir, de Georgia O'Keeffe

Pour tout le monde, cette peinture d’iris est en réalité la peinture d’un sexe de femme déguisée en motif floral. Pour tout le monde, mais pas pour l’artiste qui, toute sa vie, a affirmé qu’il n’y avait ABSOLUMENT rien de sexuel dans ce tableau qui représentait en tout et pour tout… Un iris noir. Point.

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Il est parti à la ferme des liens cassés pour prendre des petites vacances, il est avec tous ses copains, ne t'inquiète pas.

Les Epoux Arnolfini, de Jan van Eyck

On a tout faux avec ce tableau : déjà, on pense régulièrement qu’il s’agit du mariage de Giovanni Arnolfini avec Jeanne Cemani, mais ce mariage a eu lieu plusieurs années après la mort du peintre Jan van Eyck. Ensuite, la signature du tableau n’en est pas une : il n’y a pas écrit « par Jan van Eycke » mais « Jan van Eycke était là ». Bref : s’agit-il d’Arnolfini avec sa précédente femme ? Le tableau est-il signe van Eycke ? On n’en sait rien.

Crédits photo (Domaine Public) : Jan van Eyck

Le Sacre de Napoléon, par David

Une peinture presque documentaire du sacre de Napoléon ? Mon oeil. Le tableau de David est une commande impériale et est en fait un vrai outil de propagande : déjà, l’intérieur de la cathédrale Notre-Dame, gothique, a été modifié sur le tableau pour ressembler davantage à la Basilique Saint-Pierre de Rome, baroque. Ensuite, on y voit Napoléon placer lui-même sa couronne sur sa tête. De plus, la mère de Napoléon était absente lors de la cérémonie et David la fait apparaître. Bref, rien de vrai dans tout cela.

Crédits photo (Domaine Public) : Jacques-Louis David

La Liberté guidant le peuple, de Delacroix

Un brûlot révolutionnaire de Delacroix ? Hmmm… Pas tout à fait. En réalité, Delacroix s’est simplement inspiré des Trois glorieuses pour faire un tableau dans l’air du temps et accroître sa notoriété. Delacroix n’était pas révolutionnaire, il explique d’ailleurs dans une lettre qu’il a traversé les événements de 1830 en « promeneur ». D’autant que le pouvoir est un de ses commanditaires…

Crédits photo (Domaine Public) : Eugène Delacroix

Guernica, de Picasso

Voilà comment on imagine le truc : ulcéré de voir les franquistes se faire aider des nazis et des fascistes pour opprimer les républicains espagnols en pleine guerre civile, Picasso a pris son plus beau pinceau et a livré une oeuvre monumentale : Guernica. Pas tout à fait : en réalité, Guernica est une commande du gouvernement républicain pour l’exposition universelle afin de sensibiliser la communauté internationale à sa cause. Si l’on ne peut remettre en cause les sympathies républicaines de Picasso, il est clair qu’il n’aurait pas fait ce tableau sans la commande.

Crédits photo (CC BY-SA 3.0) : Papamanila

Olympia, de Manet

Un motif mythologique ? Non. Olympia est une prostituée, épaulée par une servante noire comme on en trouvait dans les bordels – son regard en dit long sur la symbolique du client ne attente. Le chat a la queue levée. Vous voyez où je veux en venir.

Crédits photo (Domaine Public) : Édouard Manet

On vous a aussi parlé des oeuvres célèbres mal interprétées et ça risque de vous en boucher un coin.