Vous avez maté Better Call Saul ? Il vous a bien mis les boules le frère de notre héros préféré, non ? Ce con de Chuck qui ne laisse aucune chance à son frère et qui nous fait hérisser le poil avec son hystérie délirante sur l’électrosensibilité (le fait de souffrir physiquement d’ondes électromagnétiques), maladie dont l’inexistence est démontrée par son frère au cours d’un épisode d’anthologie.
Tout ça pour dire que l’électro hypersensibilité (EHS pour les intimes), on n’y comprend pas grand chose et comme tous les trucs qu’on ne comprend pas, on les rejette. Pourtant les symptômes physiques semblent bel et bien exister et se manifestent de plus en plus depuis les années 80 (en même temps que se multiplient les objets du quotidien émettant des ondes, comme de par hasard). A ce jour, on n’a pas encore réussi à en prouver la cause clinique. De ce fait, il y a pas mal de questions qu’on se pose sur le sujet !
Est-ce que c'est une maladie ?
Oui d’un côté, parce qu’il existe des symptômes reconnus par l’OMS (fatigue, rougeurs etc. on y reviendra plus tard) et que ces symptômes peuvent mener à un réel handicap et des arrêts de travail.
Mais aussi non, d’un autre côté. Parce que les expériences qui ont été menées sur les patients qui se disent atteints d’EHS n’ont pas pu mettre en évidence la causalité supposée de leur maladie, c’est à dire une exposition aux ondes électromagnétiques. En fait les personnes touchées par l’EHS (= électro hypersensibilité) sont bien malades mais on ne sait pas pourquoi même si ces personnes mettent en cause les ondes électromagnétiques. On parle donc davantage d’intolérance environnementale idiopathique attribuée aux champs électriques.
Est-elle reconnue par la loi ? La toxicité électromagnétique est-elle scientifiquement prouvée ?
Bah comme on vient de l’expliquer c’est compliqué tout ça ! Un rapport de l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) rendu en mars 2018 a publié les résultats de quatre ans de recherches sur la question et explique que la souffrance des personnes atteintes d’EHS est bien réelle, mais que la science actuelle ne permet pas d’en établir une cause électromagnétique. Donc, leur toxicité n’a pas été prouvée scientifiquement. Du moins, pas au point d’entraîner les symptômes signalés par les personnes atteintes d’EHS.
En revanche, le fait qu’on utilise de plus en plus d’objets au quotidien fonctionnant avec des ondes électromagnétiques (téléphone, Wi-Fi, Bluetooth…) peut accessoirement avoir des conséquences sur le long terme. On ne peut pas parler de danger à proprement parler si l’on n’est pas exposé à très haute fréquence et sur une longue durée (ce qui n’est pas notre cas à nous autres gens lambda) toutefois, la loi s’est vue accorder des arrêts de travail pour des personnes atteintes de ce genre de pathologies. C’est du moins arrivé pour la première fois en France en septembre 2018, où un tribunal versaillais a reconnu les souffrances liées à l’EHS comme accident du travail.
JE RÉSUME : rien ne permet de prouver la toxicité des champs électromagnétiques, mais rien ne permet de prouver non plus que cette maladie soit psychosomatique. Vous suivez ?
Est-ce que dans le fond on est tous un peu électrosensibles ?
Bah du coup non. Mais oui. Mais non. En fait, selon la science, il n’existe pas ce qu’on peut appeler un « sixième sens magnétique ». Ça existe chez les oiseaux qui sont capables de capter le champ magnétique terrestre, mais pas du tout chez nous autres qui sommes des humains tout pétés. Donc non, aucun être humain n’est électrosensible sauf ceux qui se revendiquent électrosensibles mais qui en réalité ne sont pas vraiment électrosensibles même si on les appelle électrosensibles parce qu’ils pensent être électrosensibles ce qui fait d’eux, de ce fait, des personnes électrosensibles. Si je suis pas claire, n’hésitez pas à contacter mon avocat par voie postale.
Quels sont les symptômes ?
Le mystère de cette maladie réside principalement autour du fait qu’il existe des symptômes réels et reconnus mais dont la cause n’est pas prouvée. On parle ainsi de symptômes dermatologiques (brûlures, rougeurs, irritation des yeux, et picotements), mais aussi neurasthéniques (fatigue, étourdissements, nausées, nervosité, problème de concentration). Ces symptômes peuvent être d’abord passagers puis chroniques. Le problème majeur étant qu’ils entraînent le plus souvent une forme d’isolement chez la personne malade dont la pathologie ne bénéficie pas d’une reconnaissance médicale et peut être incomprise par son entourage personnel et professionnel. Cet isolement va accentuer les symptômes et les stratégies d’évitement des ondes électromagnétiques du malade peuvent vite tourner à la paranoïa.
Ça concerne combien de personnes ?
Encore une fois c’est difficile à dire puisque les symptômes varient d’une personne à l’autre et que leur cause n’est pas avérée. Ainsi les symptômes peuvent relever d’autres maladies et donc pas l’EHS. Toujours est-il que les estimations penchent aux alentours de 1.5 à 2 % de la population en France. Ce chiffre repose tout simplement sur le nombre de personnes qui estiment souffrir de l’EHS.
Existe-t-il des traitements possibles pour venir en aide aux personnes atteintes de EHS ?
Baaaaaaaaaaaaaah pour le moment pas trop puisqu’on ne parvient pas à diagnostiquer le réel problème de ces personnes souffrantes. Du coup le traitement est compliqué à trouver puisqu’en soi, l’éloignement aux ondes électromagnétiques n’est pas censé concrètement les guérir (puisque, concrètement ce n’est pas de cette exposition qu’elles souffrent). Pour pouvoir les soigner sur le long terme, il faut trouver à quelles autres pathologies peuvent correspondre ces syndromes et les prendre en charge en fonction. Encore une fois, le corps médical ne remet pas en question les symptômes et les souffrances des patients mais il n’est pas vraiment efficace de réduire leur exposition aux ondes. Si cela provoque un soulagement psychosomatique, en soi, ça ne guérit pas la maladie.
Comment font les gens qui souffrent de EHS ?
Ils galèrent. Si leur souffrance est reconnue, leur maladie ne l’est pas. Ils sont incompris et ne parviennent à réduire leurs maux qu’en s’éloignant dans des « zones blanches » censées ne pas être traversées par des ondes électromagnétiques. Ils peuvent trouver de l’aide auprès d’associations telles que PRIARTEM ou Robin des toits mais grosso-modo c’est un mal-être dont il est extrêmement compliquer de soigner les symptômes. Du coup, certains vivent comme des reclus dans des cabanes en pleine forêt loin de toutes les ondes. On peut pas leur en vouloir si c’est la seule chose qui atténue leur souffrance…
Doit-on avoir peur de notre boîtier Linky ?
Si on vous en parle c’est parce que d’après nos recherches, la question revient souvent ! Selon un article du Monde, en résumé les données émises par le compteur Linky passent par les fils électriques et pas par la Wi-Fi ni par les ondes hertziennes. Le compteur n’est actif normalement qu’une fois par jour durant quelques secondes pour relever les données, pas plus. On ne peut donc pas craindre quoi que ce soit de la part de ce malheureux petit compteur. Mais bien sûr, quand on est atteint d’EHS, c’est une autre paire de manche pour les raisons que nous avons explorées précédemment. En tous les cas, le boîtier émet des ondes électromagnétiques trop faibles pour constituer le moindre danger.
Vous l’aurez compris, ce n’est pas une mince affaire et il y a encore des recherches à faire à ce sujet. N’oublions pas que les premières alertes concernant l’amiante sont apparues presque un siècle avant qu’on en interdise l’usage… DONC BON. Ouais, je conclus sur un « donc bon », ça vous pose problème ?
Sources : Les pieds sur terre : « Électrosensible », Wikipédia, France Inter « Le téléphone sonne », Libération, Le Figaro, Le Parisien, Infirmiers , Nouvel Obs, Le Monde : Linky en questions