sms
Crédits photo (creative commons) : Niklas Bildhauer

Pendant les années qui ont suivi la démocratisation des téléphones portables, les garants d'une orthographe irréprochable (les "vieux cons", donc) se sont mobilisés pour mettre en garde contre la dégénérescence de notre patrimoine linguistique. Mais aujourd'hui, on n'en est plus là : le langage SMS n'est pas seulement dangereux pour notre culture, il est surtout inefficace en plus d'être ridicule. Le débat n'est donc plus "comment endiguer ce phénomène?" mais "Pourquoi n'a-t-il pas encore disparu?" tant les raisons d'arrêter purement et simplement ces pratiques sont nombreuses. C'est bien simple, il y en a une bonne dizaine :

  1. Une économie de caractères toute relative
    Ecrire comme un souillon en utilisant la phonétisation et du rébus typographique n'est pas forcément efficace. Par exemple, si on vous propose un civet au dîner, répondez : "G jamè manG du lap1", qui vous fait économiser, au mieux, 30% des caractères utilisés. Si vraiment vous voulez du rendement, il faut en plus faire appel à des abréviations : "G jms manG lp1"", mais on conviendra que c'est n'importe quoi.
  2. Ecrire en SMS est utile quand on a un mobile du Moyen Âge
    Si vous écrivez encore "mwa" pour parler de vous, c'est que vous avez eu la flemme de taper 3 fois sur la même touche pour faire un "O". Et Si vous avez utilisé ce stratagème, c'est que vous avez un téléphone qui a connu les premières saisons de Lost et qui a peut-être même servi à annoncer la victoire de George Bush.
  3. L'ambiguité de certaines formules
    Le très efficace "à12C4" sera compris par la majorité de vos interlocuteurs comme un cordial "à un de ces quatre matins". Mais vous avez peut-être dans votre entourage un ou deux tarés qui comprendront "à 12 dans une citroën C4", ce qui clôt curieusement une conversation, "à minuit sur Canal+" qui pourrait être mal interprété un premier samedi du mois ou "à midi, on fait tout péter au C4", si vous avez des potes terroristes.
  4. Le langage SMS a ses règles et ses intégristes
    Depuis le temps qu'il existe, ce mode d'expression a engendré ses "Maître Capello", ou plutôt "KPlo" qui corrigent les libertés que vous pourriez prendre avec la syntaxe et orthographique SMSienne. Finie l'insouciance des premières années, si désormais vous écrivez sur un forum 'thx', il y a peut-être un taré qui vous reprendra et vous expliquera qu'on parle français ici, on ne dit pas "thx" mais "mr6".
  5. C'est déjà has-been depuis longtemps en Amérique
    Une étude menée il y a quelques années montrait que moins de 20% des utilisateurs faisaient appel à ce langage. Il se trouve qu'environ 20% des Américains ne savent pas reconnaitre leur pays sur une carte et 20% également des citoyens américains pensent que Barack Obama est musulman, ça vous donne une idée du profil-type de l'utilisateur du langage SMS.
  6. Les difficultés à l'international
    Votre pote anglais veut vous signifier son enthousiasme avec un "gr8" synonyme de "Great!", mais vous, vous vous demandez pourquoi il vous parle du sentier de grande randonnée 8 reliant Saint Brévin les Pins (Loire-Atlantique) à Hendaye en Pyrénées-Atlantiques. Pareil si on termine une conversation en espagnol par "a2", c'est pour dire "adios", inutile de répondre "A2?... touché coulé!"
  7. Le langage SMS a d'ores et déjà été trop loin
    Tellement loin qu'un écrivain, Phil Marso, a poussé l'absurde jusqu'au bout : des romans en SMS, des adaptations des oeuvres de La Fontaine en SMS, "le corbô É le renar, le ch'N É le rozô, la grenou'ye ki v'E se f'R Ø'6 gro ke le b'Ef"... Si votre passion, c'est de chier sur le patrimoine, vous allez aimer.
  8. Les progrès technologiques rendront ces pratiques ridicules
    Quand on aura un bon logiciel de reconnaissance vocale, trouvera-t-on encore des cons pour lui dicter "M.D.R." sans sourciller? Oui, certainement. Tâchez de ne pas en faire partie.
  9. Le développement des médias de masse encourage l'uniformisation de l'orthographe
    Contrairement à ce que pensait Raymond Queneau jusqu'à la fin des années 60. Ce qu'il appelait alors le "néo-français", une bouillie phonétique assez proche du langage SMS, ne s'est jamais vraiment imposé, preuve que le développement de la presse et de la télé a eu une action positive.
  10. Le rejet est total
    On l'a vu, à part disposer d'un téléphone du siècle dernier, rien n'excuse de s'exprimer ainsi. Sauf Twitter direz-vous... Limitation de caractères, média communautaire par excellence, et de surcroît assez jeune... Sauf que si vous communiquez par Twitter avec du langage sms, vous risquez d'être retwitté par @TweetsDeGogols et devenir la star de votre quartier. On ne le vous souhaite pas.