Véritable déesse de la pop musique proclamée comme telle par l'industrie du disque, Lana Del Rey est l'icône marketing qui est sur toutes les lèvres (même les plus petites) depuis le carton 2.0 de son single "Video Games", diffusé sur Youtube depuis près d'un an. Difficile de ne pas avoir de point de vue sur cette chanteuse à la bouche de canard et à la voix dénuée d'identité, vilipendée farouchement par les uns, déifiée dévotement par les autres. Vous avez donc le choix entre hurler avec les loups ou piocher dans ses bonnes raisons de ne pas orienter votre colère à l'encontre du système sur sa seule personne. En cherchant un peu, vous trouverez pire escroquerie que la carrière de Lana del Rey. la preuve :
- Elle réhabilite l'image des roux
Depuis quelques mois (à peine), des études scientifiques largement érudites (ou la popularisation de Lana, je sais plus trop) ont prouvé l'existence d'une âme chez les personnes atteintes de cet handicap physique que le profane a coutume de nommer "la rousseur". Le roux ne serait donc plus ce suppôt de Satan envoyé sur Terre pour organiser les festivités en l'honneur de l'arrivée de l'Antéchrist, mais bien un être tout aussi normal que François Hollande, qui paye ses impôts et qui ne marche pas sur l'eau. Merci Lana, d'avoir évité un génocide mondial de grande ampleur. - Avant, elle était moche
Vous avez des vieux dossiers à camoufler qui remettent en cause le statut de Manon Lescaut en puissance que vous arborez aujourd'hui ? Comme Lana Del Rey, balancez vos cadavres à la flotte, et remodelez au marteau-piqueur ce qui faisait l'essence même de votre vous désuet. Avant d'être l'icône pop qu'elle est aujourd'hui, Lana s'appelait Lizzy Grant, et ses lèvres aujourd'hui si pulpeuses (grrrrr) étaient d'une petitesse affligeante. La bipolarité onomastique semble être la base du succès... - Elle sait se servir dans le glorieux passé de la culture américaine
Un peu comme dans une dissertation au bac ou pour une négociation salariale, on n'aborde jamais un sujet sans exemples pour l'illustrer. Dans la carrière de Lana, c'est un peu pareil. Elle se fait appeler officiellement « gangsta Nancy Sinatra », revendique une musique totalement "Hollywood Sadcore", possède le même strabisme boudeur que Julia Roberts dans "Pretty Woman", elle a piqué les cheveux et la clope de Rita Hayworth alias Gilda dans le film éponyme... Avant-gardiste visionnaire gorgée de références pop et élitistes, Lana Del Rey est plus qu'une invention médiatique, elle est aussi une jolie fusion de toute une culture branchouille qui ne demande qu'à se trouver un porte-étendard. La com' de Lana est en soi une œuvre d'art bourrée de références. - La célébrité est en elle-même une source d'inspiration
Lana del Rey est plus qu'une poignée de tube. Lana del Rey est une performance permanente, un personnage nourri avec l'adoration et la haine qu'elle suscite. Lan del Rey est à elle seule une construction artistique comme Michael Vendetta ou Carlos. Sauf que Carlos n'a jamais conclu un clip avec une extrait d'Eric Satie. Non, même pas Big Bisou. - Video Games est une vraie bonne chanson
Et c'est assez malhonnête de dire le contraire. Si cette chanson était interprétée par Tori Amos ou par Fiona Apple, on aurait crié au génie. Magic et NME l'ont même placée parmi les meilleurs singles de 2011, à l'époque où l'on pouvait encore être objectif sur cette chanteuse. Être indépendant aujourd'hui, c'est aussi écouter avec ses oreilles et penser avec sa tête. - Elle a un sens de la mode cohérent
Savoir chanter c'est bien, papillonner des cils glamoureusement aussi, mais avoir un style de rêve c'est primordial. S'imposer une véritable dictature de la garde-robe sans faire n'importe quoi permet à terme de se créer une authentique notoriété. Sa récente participation aux publicité H&M dans des spots évoquant délibérément le Twin Peaks de David Lynch est une preuve de bon goût qu'on ne lui enlèvera pas. - Elle est le parangon de notre époque
Pour être au top de la hype il vous faudra : un brushing gonflé à bloc, porter un col claudine, posséder une webcam. Ensuite, il suffit d'opter pour un regard de biche effarouchée pliant sous le poids de 6 couches de mascara en buvant du Jack Daniel's au goulot, tout en parvenant à conserver une duck face élégante sans oublier de chanter d'une voix mélancolico-dramatico-plaintive-rauque-juste. Lana Del Rey est le produit de nos pratiques dans une société gouvernée par les réseaux sociaux, une icône par définition. Et si on est déçu du résultat de cette synthèse, on ne peut s'en prendre qu'à nous même. - Elle nous fait découvrir les trésors de la chanson grecque
Selon certaines mauvaises langues, Video Games serait un honteux plagiat de I dromi pou agapissa (Les routes que j'ai aimées), interprété par Eleni Vitali et composé par Giorgos Stavrianos en 1991. L'accusation de plagiat est l'apanage des plus grands (Madonna, The Verve, Radiohead, Mika...) et si on tend un peu l'oreille sur cette chanson grecque, on pourrait bien y trouver un peu de Louise Attaque.
- On peut faire plein de jeux de mots potaches avec son nom
De "Llama del Rey", à "Lana Del Rey des fesses", en passant par Lana Del Duck, la toile rivalise de surnoms aussi originaux que matures afin de qualifier la chanteuse. Et puis, ça occupe le temps, quand même. - Vous aimez nager à contre-courant
Vous avez votez Jacques Cheminade aux dernières élections, au premier comme au deuxième tour ? Vous portez de jolies tennis blanches avec votre costume sombre trois pièces ? Vous commandez une salade "pour manger équilibré" quand vous déjeunez au McDo ? Proclamez haut et fort votre admiration infinie pour l'interprète de "Blue Jean", aussi convaincante en studio qu'en live, aussi charismatique qu'une alchimie de Donald Duck et de Madonna. Votre réputation de marginal has been rigolo perdurera longtemps encore, à n'en pas douter.
Et vous, vous l'écoutez à fond avec votre iPod, la voix sensuelle de Lana Del Rey ?