Le Tour de France, ce sont de jolis paysages, d’épatants exploits humains, des pentes très raides, Gérard Holtz, la caravane Cochonou, l’ennui latent des jours d’été, les grands-parents qui ronflent, une douce ivresse du temps jadis. A condition de savoir comment s’installer pour s’endormir correctement devant.
Allongé sur le côté, la tête légèrement surélevée
Idéal pour les étapes de montagne. On a le sentiment que les coureurs sont sur du plat et on ne comprend pas pourquoi ils ont l’air de fournir un tel effort. D’ailleurs, en parlant d’effort, je fermerais bien les yeux, moi.
Sur le dos, un vidéoprojecteur projetant l'étape au plafond
Pas désagréable : on voit les paysages en 4×3 sur une large surface et on peut profiter des vues aériennes à l’envers. Ensuite, au moment de s’endormir, on peut se tourner un peu sur le côté pour plus de confort et ne plus regarder du tout.
Jambes repliées dans un énorme coussin
L’avantage est que l’on a le sentiment d’être assis tout en étant, au fond, absolument allongé. On s’enfonce peu à peu dans le confort, on ferme les yeux, déjà on écoute le Tour de France, ah : déjà, on ne l’écoute plus.
Sur le ventre, tête inclinée, le téléviseur lui-même incliné.
On aura ainsi une vision parfaitement horizontale de l’épreuve, avant bien sûr de renoncer à toute vision, horizontale ou non, au profit d’un rêve où l’on devra se sortir d’un piège tendu par une pieuvre géante qui porte un monocle.
Affalé dans le canapé
On prendra soin d’enlever ses chaussures, de mettre des affaires confortables et de couper le son du téléviseur. Peu à peu, les taches rouges et jaunes de la caravane Cochonou et du leader au classement s’effaceront pour faire place au noir intégral, de ce noir pas si terrifiant qui intervient quand les paupières se ferment.
Sur le côté, la tête reposant sur un bras plié
Position dite « de séduction », position dite aussi « de sécurité ». Bien sûr, Gérard Holtz nous apparaîtra à l’envers, mais l’esprit humain est suffisamment puissant pour reconstituer les images dans le bon sens et puis, de toute façon, on s’endort généralement à la première apparition de Gérard Holtz.
Entortillé dans un plaid
Le plaid servant à contrebalancer l’air qui s’infiltre depuis la fenêtre ouverte à l’espagnolette. On s’entortillera tout doucement dans le plaid comme les coureurs dans leur tenue moulante, et on se dira qu’on est bien, qu’on est bien et bien content de ne pas devoir monter une pente à 45 degrés.
En boule
Voilà, on est en boule, on est sur le côté, position foetale. On n’est pas si mal. On ne voit pas vraiment la télévision, mais on a toujours eu une nostalgie pour le charme un peu surannée du transistor, et cette étape, quand on l’écoute, a un pouvoir hautement évocateur, d’ailleurs on s’y croirait, d’ailleurs on y est, on est un coureur sur le Tour oups on a eu un soubresaut, c’est probablement que le sommeil arrive.
Sur le dos, une jambe pliée
Presque un hommage au cyclisme. Sauf que la jambe ne bouge jamais. Qu’on n’est pas sur un vélo. Et qu’on n’avance pas du tout. Contrairement à ces cons qui s’échappent à 50 bornes de l’arrivée et qui n’ont aucune chance de terminer premier alors qu’ils sont en nage.
Nu, en position du lotus
Le Tour de France véhicule un agréable lot de messages positifs tout à fait compatibles avec la pratique du yoga. Surtout du yoga endormi, une variante assez rare du yoga.
Allez Poupou Zzzzzz….