On n’a que peu de souvenir du passage des Romains sur nos terres gauloises (les chiffres étaient pourris, leurs fringues on n’en parle même pas) mais force est d’avouer qu’aux premiers siècles de notre ère, les bougres ont construits quelques édifices plutôt costauds qui reléguaient à la préhistoire nos cahutes en bois et en terre. Le meilleur exemple est la collection de ponts et d’aqueducs qui subsistent encore sur notre territoire deux millénaires après. Petite sélection :
Pont Julien, Vaucluse, celui qui ne traverse plus grand chose
Quand on voit le filet d’eau que représente aujourd’hui le Calavon à cet endroit, on se dit que les mecs, au IIIe siècle de notre ère, ont vu un peu grand. Mais comme cette rivière a creusé les gorges d’Oppelette, on va rester respectueux. Reste que ce pont a fière allure et on se voit mal passer à côté sans se fendre d’une petite photo.
Le Pouzin, Ardèche, celui qui fait le minimum syndical
Une arche, pas de folie, un joli reflet dans l’Ouvèze, au Pouzin ont fait les choses simplement, mais on les fait bien. Cet édifice du IIème siècle traverse les âges sans prendre une ride.
Vaison-la-Romaine, Vaucluse, celui qui n'inspire plus confiance
Peut-être qu’il y a 2000 ans cet édifice respirait la sûreté. Mais là, on est davantage sur un « cap’ ou pas cap’ de traverser ». C’est vrai qu’entre temps, le pont a subi un dynamitage allemand et quelques crues, on est quand même sur du costaud.
Pont du Gard, celui qui calme tout le monde
Ok, là, on parle de pont. L’édifice est si massif que la commune qui l’abrite n’a pas eu l’outrecuidance de porter un autre nom et s’appelle donc « Vers-Pont-du-Gard ». On ne s’avance pas trop en disant qu’on a affaire là au patron des ponts-aqueducs du monde romain.
Ansignan, Pyrénées-Orientales, celui qui fait un peu bricolé
L’intention est bonne, mais à force de rajouter des trucs au fil des siècles, c’est devenu brouillon. Un pont avec une voie romaine, puis un aqueduc par dessus qui transforme le chemin originel en tunnel… des rallonges au XIIIème et au XIVème siècle, et on en est là, avec ce truc massif mais pas vraiment élégant.
Pont Flavien, Saint-Chamas, Bouches-du-Rhône, celui qui se la raconte un peu
Sérieux ? Deux grandes portes à l’entrée et la sortie d’un pont d’une vingtaine de mètres ? Pourquoi pas des mecs avec des trompettes et un majordome qui vous annonce quand vous décidez de traverser la Toulourbe ? Apparemment, en -10 ou -20 av. JC, passer sur un pont, c’était un truc sérieux et on s’habillait bien pour le faire.
Viviers, Ardèche, celui qui mériteraient un petit rafraichissement
Les mecs qui ont construit ce truc devaient être pressés de traverser l’Escoutay et ont peut être négligé les finitions. En tout cas, c’est du costaud, même si ce n’est pas l’architecture la plus raffinée du monde gallo-romain.
Pont Tibère, Sommières, Gard, celui qui a une bonne tête de premier de la classe
Initialement composé de 20 arches impeccables sur 190m (il n’en reste que 7, les meilleures), de jolis reflets sur le Vidourle et une histoire plus ancienne que la ville de Sommières, le Pont Tibère doit être bien dégouté de ne pas être classé monument historique. Et on le comprend.
Pont du Buès, Alpes de Hautes Provence, celui qui n'est pas venu là pour vendre des cravates
Apparemment, les cailloux étaient gratuits quand on a bâti ce pont qui est peut-être, à notre goût, un poil massif. Mais les mecs à l’époque ont dû envisager d’y faire passer des éléphants et même des chars d’assaut, avant même de les avoir inventés (et c’est là tout le génie des Romains).
Pont de Gras, Guérande, Loire Atlantique, celui qui fait honte à l'Empire Romain
Un nom à la con, un alignement douteux, ce pont n’est ni fait ni à faire. Là, la photo que vous voyez, c’est après la « restauration » qui a eu lieu en 2014. Même Wikipedia n’a pas osé mettre de photo tellement c’est ridicule. La page précise « En hiver, il arrive que le gué soit submergé en plusieurs endroits ». Sans déconner… c’est con, c’est la fonction première d’un pont.
Pont Ambroix à Ambrussum, entre le Gard et l'Hérault, celui qui aurait dû arrêter sa carrière avant
C’est un peu la crainte de tout les ponts romains : faire le millénaire de trop. On sait qu’à la fin du XVIIème siècle, il ne comptait plus que 4 arches sur les 11 initiales. Apparemment, au Moyen Âge, la construction d’un pont à péage plus loin a encouragé les autorités à démolir celui-là (pas con). Bon… on n’est pas pour faire table rase du passé, mais ça ne ressemble à rien.
Allez, allons tous à Rome pour leur dire merci pour tous ces ponts.