Il existe peu de choses plus satisfaisantes que d’aller dans un resto (sauf si c’est un resto de merde, bien évidemment). Au resto, c’est vous le chef, c’est vous qui commandez, et c’est vous qui mangez sans rien avoir à préparer. Mais il ne faut pas oublier qu’il y a un vrai chef dans la cuisine, avec des vrais cuistots ; pendant que vous vous la coulez douce, eux carburent pour vous satisfaire. Et c’est au moment de choisir votre plat sur le menu que votre relation prend un tournant : selon ce que vous commanderez, vous pouvez soit rendre leur service rapide et agréable, soit le transformer en enfer. Car oui, il y a des plats qui sont extrêmement chiants à cuisiner. Des plats que les chefs détestent préparer, même s’ils ne vous le diront jamais.
« Euh alors pourquoi ils les mettent sur la carte de leur resto s’ils n’aiment pas les préparer ??? »
Parce qu’ils sont gentils et qu’ils aiment vous faire plaisir. Ne cherchez pas la petite bête.
Les gnocchis
Ces petites boules de pommes de terre enfarinées sont un délice pour celui qui a la chance de les avoir dans son assiette, mais aussi un supplice pour celui qui doit les préparer. Non pas que ce soit difficile, mais façonner chaque petit gnocchi un par un prend un temps fou, même pour un bon cuistot avec une bonne technique. Faites le test la prochaine fois au resto : dites à haute et intelligible voix : « Eh bien écoute Brigitte, je crois bien que je vais prendre des gnocchis ». Vous entendrez des sanglots s’élever depuis les cuisines.
Les artichauts
Nettoyer des artichauts est extrêmement pénible. Sur l’échelle de la pénibilité, c’est entre « choper une tourista pendant de magnifiques vacances à Bali » et « apprendre qu’on a un cancer colorectal incurable ». On peut comprendre que ça rebute du coup.
Les poivrons rôtis
Pour faire des poivrons rôtis il faut :
– Carboniser la peau pour qu’elle soit bien noire
– Envelopper les poivrons dans des sacs plastiques pour qu’ils fument en refroidissant
– Retirer tous les morceaux de peau carbonisée (ce qui prend des plombes)
– Retirer chaque pépin à l’intérieur du poivron (ce qui prend autant de plombes)
– Couper
– Appeler votre femme et votre enfant que vous n’avez pas vu grandir puisque ça fait 10 ans que vous vous occupez de vos putains de poivrons rôtis.
Les œufs pochés
Les chefs ont beau avoir appris la technique dès leurs premiers cours en école de cuisine, ils ne sont jamais à l’abri de foirer un œuf poché et de trop cuire le jaune. Et foirer un plat, pour un chef, c’est presque comme foirer un enfant (sauf que l’œuf poché raté, lui, ne se mettra pas à prendre du crack à 19 ans).
Un steak "bien cuit"
Ce coup-ci, c’est un peu différent : le steak « bien cuit » n’a en soi rien de bien compliqué à préparer. En revanche, il exaspère les chefs qui savent tous qu’un steak ne doit jamais être « bien cuit ». Un steak, c’est fait pour être mangé bleu, saignant, voire à point. C’est pas fait pour devenir une semelle sans aucun goût. Du coup, si vous commandez ça, sachez qu’une personne vous jugera très fort de l’autre côté de la porte battante.
Les crevettes
Décortiquer et retirer les excréments de crevettes est aussi plaisant que de surprendre votre partenaire (Brigitte) avec un autre partenaire (Maurice, son collègue) que son partenaire légitime (vous). Pensez-y avant de commander un plat contenant des crevettes fraîches.
Les calamars frits
Nettoyer, éviscérer et peler des calamars frais pleins d’encre, c’est la partie la plus chiante du taf. Chiante, et puante. À l’image de la vie. Oui ça va pas fort en ce moment désolé.
Tout ce qui nécessite de faire fondre du sucre
La plupart des cuisiniers aiment travailler le sucre, mais dans une cuisine de resto tout est toujours en mouvement et les accidents sont vite arrivés et le sucre brûlant colle à la peau et laisse des marques à tout jamais et après votre femme vous quitte car elle trouve que cette cicatrice sur votre bras est disgracieux et elle vous révèle que de toute façon ça fait 1 an qu’elle se tape son collègue Maurice qui a une voiture plus grosse que la vôtre ainsi qu’un abonnement au Jokari Club de Saint-Raphaël. Bref c’est chiant.
Les planches de fromages et charcuteries
Dans les endroits qui ne proposent que ça, c’est pas un problème. Mais dans les restos qui ont plein de plats dont des planches fromages/charcut’, c’est beaucoup plus relou parce que les cuisiniers doivent arrêter tout ce qu’ils sont en train de faire pour sortir 15 produits différents et en découper quelques petits bouts de chaque. Bizarrement, ça prend plus de temps à faire que des plats cuisinés.
Les pièces montées
« Mais monsieur, vous êtes dans un restaurant de poisson ici »
« Je ne bougerai pas tant que je n’aurai pas ma pièce montée »
Après faut arrêter d’être des clients relous aussi.