Être une femme et faire des découvertes, jusque récemment, c’était le meilleur moyen de se faire pomper son idée par des mecs mieux introduits, couper l’herbe sous le pied, chaparder son prix Nobel et mourir dans l’anonymat. De nombreuses découvertes majeures (ou moins majeures) ont été injustement attribuées à des hommes au cours des deux derniers siècles. En espérant que ça cesse.
La fission nucléaire
C’est Lise Meitner, une autrichienne juive qui a découvert le principe de la fission, dès 1938. Le hic, c’est que quand on est juive, autrichienne et en 1938, on n’a pas très exactement le vent en poupe. C’est donc Otto Hahn, son collègue, qui s’est vu attribuer les honneurs de cette découverte majeure qui a permis ensuite au monde de vivre dans la peur panique d’une explosion pendant les 60 dernières années. Et Otto d’avoir un prix Nobel en 44. Contrairement à Lise. Mais qu’est-ce qu’elle aurait bien pu faire avec un million d’euros ? On se le demande.
Le Monopoly
En 1934, Charles Darrow, un chômeur victime de la crise, est chez des potes. Il tombe sur un jeu inventé quelques années plus tôt, en 1903, The Landlord’s game. Et ce jeu a été inventé par Elizabeth Magie, une célibataire de 44 ans qui vivait largement en avance sur son temps et voulait sensibiliser les joueurs aux risques du capitalisme à outrance. Mais le jeu a fait un flop : que fait Darrow ? Il pompe le jeu et crée le Monopoly, un jeu où le but est de se mettre en situation de monopole immobilier, soit une philosophie inverse à celle de sa créatrice originale. Avec le succès que l’on sait.
Le sac en papier
Margaret E. Knight a inventé en 1868 une machine qui permettait de plier et coller du papier pour former un sac. Pratique pour les courses. Enfin pratique jusqu’à ce qu’un mec arrive, voit l’invention, et dépose le brevet à sa place. Malgré une bataille juridique, il aura fallu des années pour que ce qui était à César (enfin à Margaret, en l’occurrence) lui soit rendu.
La scie circulaire
En 1813, Tabitha Babbitt, une femme qui avait beaucoup trop de jeux de mots à faire avec son nom, invente le concept de scie circulaire pour remplacer les scies tenues par deux hommes autour d’un arbre et absolument impraticables. Sauf qu’un mec, Stephen Miller, arrive dans l’équation pour soutenir que c’est lui qui a inventé l’outil en 1793. Sans pouvoir en apporter la preuve. Il gagne pourtant sa bataille juridique, le bougre.
La structure de l'ADN
Pour la communauté scientifique, ce sont à Crick et Watson que l’on doit la découverte de la structure en hélices de l’ADN, une avancée qui leur vaudra un prix Nobel de médecine. Sauf que la véritable découvreuse de la double hélice s’appelle Rosalind Franklin et qu’elle a été totalement pillée de ses découvertes. Sans compter qu’elle aura pas eu beaucoup de temps pour se défendre, puisqu’elle est morte en 1958 à 37 d’un cancer des ovaires.
Les pulsars
Jocelyn Bell Burnell était étudiante à Cambridge en 1967, quand elle a découvert le pulsar, cet objet cosmogonique qui émet un rayonnement magnétique tout à fait particulier. Mais comme elle était étudiante, son directeur de thèse est passé par là. Et qu’est-ce qu’il a fait, Antony Hewish ? Il a dit « C’est moi qu’ai trouvé. » Et Antony Hewish d’être récompensé. Et ouich.
La composition atomique des étoiles
Obligée de faire le voyage d’Angleterre jusqu’aux Etats-Unis pour avoir le droit de travailler, Cecilia Payne-Gaposchkin débarque dans le plus tellement nouveau monde en 1920 et découvre 4 ans plus tard que les étoiles et la terre, c’est pas tout à fait le même combat, puisque les premières sont en fait composées grosso modo à 100% d’hydrogène et d’hélium. Un professeur émérite, Henry Russel, regarde tout ces petits travaux et fait une moue, en expliquant à la jeune femme qu’elle a forcément tort puisque c’est une femme. Avant, quatre ans plus tard, de publier les résultats de Cecilia Payne-Gaposchkin en son nom en la mentionnant à peine.
Les chromosomes X et Y
Encore une élève qui se fait piquer sa découverte par son prof. Nettie Stevens avait beau avoir fait tout le boulot sur le codage du sexe de l’enfant par les chromosomes, c’est bien Thomas Hunt Morgan, son prof, qui a récolté les fruits de la découverte et obtenu un Nobel en 1933. Pauvre Nettie Stevens.
La composition génétique des bactéries
C’est à Esther Lederberg, une biologiste américaine, que l’on doit la découverte du phage lambda, un virus à même d’infecter une bactérie dont le nom est trop compliqué pour être écrit ici, en 1951. Mariée à Joshua qui est aussi son collègue, elle mène vie de couple et de recherche à deux, mais seul Joshua aura doit au prix Nobel pour cette découverte. Quant à Esther Lederberg, elle devra implorer des universités pour obtenir un poste de vacataire malgré sa surqualification évidente.
Le fer à lisser
C’est Ada Harris qui a déposé la première le brevet pour le fer à lisser en 1893, et non pas Marcel Grateau comme le veut l’histoire populaire. En revanche, Grateau, lui, a bel et bien inventé le fer à friser, mais on peut pas dire que ça serve exactement à la même chose. Comme quoi, la recherche, c’est pas du grateau.
Quand on pense que Sardou chantait les femmes des années 80 en étant ultra macho, on se demande ce qu’aurait été sa version en 1880.