« L’homme est un loup pour l’homme » disait le philosophe Hobbes, omettant de dire qu’il est aussi bien souvent un humain pour les animaux (entendez par là une saloperie). On pourrait se défendre de bien des manières, mais reconnaissons quand même notre préhension à ruiner de belles choses pour y construire des parkings. Sur le règne animal, l’homme a un impact assez néfaste et on peut observer plusieurs exemples probants qui nous montrent que oui, on est des bons gros cancers pour cette planète. Des évolutions assez inattendues que différentes espèces ont adoptées (de force) afin de survivre à nos changements.

Les cornes des mouflons canadiens qui rétrécissent

Le mouflon canadien est une brave bête qui se nourrit de plantes et se promène dans les grandes étendues sauvages d’Amérique du Nord. Le mâle possède de lourdes cornes arrondies en courbes et les chasseurs aiment bien récupérer les plus grosses d’entre elles pour combler un complexe de virilité et en faire probablement des trucs qu’ils n’oseront pas avouer en public. Le souci, c’est qu’à force de tuer les spécimens aux plus grosses cornes, la taille de ses dernières a réduit de 25% pendant les 30 dernières années. Une réduction significative peut-être considéré comme une défense naturelle directement provoquée par la main de l’homme.

Crédits photo (Domaine Public) : Jon Sullivan, PD Photo.org

La disparition du crapaud doré

Elle est pas mignonne cette petite bête ? Bah elle n’existe plus. Bon, je ne vais pas faire le tour des espèces qui se sont éteintes à cause de l’homme, mais le crapaud doré est devenu le symbole du déclin des espèces d’amphibiens. Il se réfugiait en haut de certaines montagnes du Costa-Rica mais la pollution de l’air amenée par la présence de l’homme, le réchauffement global et les maladies comme la chytridiomycose (provoquée par un champignon) seraient les causes principales de sa disparition.

Crédits photo (Domaine Public) : Charles H. Smith

Les chiens errants de Bombay qui deviennent bleus

Dans la région de Taloja, zone industrielle de Bombay (Inde), les habitants ont découvert en 2017 des chiens au pelage anormalement bleu. D’abord préoccupé par la santé des animaux, on étudie les spécimens qui semblent « aller bien » en dehors de leur coloration. Après quelques lavages, la couleur bleu disparaît peu à peu et on pense trouver la raison de ce changement en faisant le lien avec la rivière Kasadi assez proche du lieu de leur apparition. Tout partirait de plusieurs usines qui déversent des détergents dans l’eau de la rivière dans laquelle de nombreux chiens se baignent et qui aurait coloré le pelage de ces animaux qui sont d’ailleurs protégés par la loi en Inde.

Ce contenu n'existe plus

Il n'a pas souffert, promis

Les défenses des éléphants qui disparaissent

Comme le révèle National Geographic, au Mozambique pendant la guerre civile de 15 ans, à peu près 90% de la population des éléphants a été tuée pour nourrir la population et acheter des armes avec la vente d’ivoire. Ce qu’on a observé des suites de cette action de l’homme est la disparition progressive des défenses chez de nombreux nouveaux nés de l’espèce, comme par « protection » contre le braconnage semblable au rétrécissement des cornes des mouflons. Les chercheurs souhaitent maintenant savoir comment cela va altérer le mode de vie de ces éléphants car leurs défenses leur servent au jour le jour, pas seulement pour se défendre mais pour creuser la terre afin de trouver de l’eau ou pour arracher l’écorce des arbres et se nourrir de leurs minéraux. La disparition des défenses n’est pas un cas isolé au Mozambique mais dans la plupart des pays où les éléphants vivent et où le braconnage a lieu.

Crédits photo (CC BY-SA 2.0) : Lewis Clarke

Les moustiques du métro qui évoluent différemment

Si l’homme est responsable de la disparition d’espèces, il en créé parfois accidentellement aussi. Sur ce point, les moustiques du métro (Culex pipiens f. molestus) présents dans de nombreux réseaux de métro à travers le monde en font partie. C’est ceux du métro londonien qui ont été étudiés plus en détails par les chercheurs. On a réalisé plusieurs différences avec les espèces de moustiques présentes à la surface (Culex pipiens) : ceux du métro ne tolèrent pas le froid, mordent des rats, des souris et des humains alors que ceux de la surface tolèrent le froid, hibernent en hiver, et ne mordent que les oiseaux. De plus, après avoir tenté d’hybrider les deux espèces, on a observé que leurs oeufs étaient stériles, il y a donc isolement reproductif. Cela va même plus loin car en étudiant les spécimens des différentes lignes du métro, on a observé que ceux des lignes Central, Victoria et Bakerloo étaient génétiquement distincts.

Crédits photo (CC BY-SA 3.0) : Walkabout12

La mite "poivrée" qui change plusieurs fois de couleur

Appelée Pepper Moth en anglais, elle représente une instance d’évolution provoquée par l’homme. Initialement de couleur blanche (crème) avec des tâches noires, c’est pendant la révolution industrielle que la couleur de celle-ci s’est peu à peu noircie. Quelques années plus tard, lorsque la pollution de l’air s’est amoindrie, sa couleur claire est redevenue la norme. On attribue la cause de cette évolution à la suie qui retombait des usines dans les campagnes environnantes de Manchester et de Londres et qui noircissait les arbres en les recouvrant. Les mites « blanches » étaient alors beaucoup plus visibles par les prédateurs (oiseaux) et auraient changé de couleur afin de se dissimuler plus facilement sur les troncs d’arbres plus sombres.

Crédits photo (CC BY-SA 3.0) : Chiswick Chap

Le rétrécissement de certaines espèces de poissons

Le professeur Eric Palkovacs de l’Université de Santa Cruz (Californie) a étudié plusieurs espèces de poissons comme la morue atlantique avant d’en venir à la conclusion que la pèche massive de l’homme avait provoqué un rétrécissement « inattendu » de plusieurs espèces. En pêchant les poissons les plus gros, nous avons provoqué un changement de la structure génétique de certains poissons. Comme les gros poissons disparaissent, les plus petits sont ceux qui multiplient leurs chances de se reproduire et de faire évoluer l’espèce avec le gêne de « plus petite taille » (pour simplifier). Mais on provoque également avec cela un avancement de la maturité sexuelle chez certaines espèces, puisque leur espérance de vie « diminue », elles doivent se reproduire plus rapidement. Palkovacs donne l’exemple de la morue atlantique en disant qu’a une époque elle pouvait mesurer plusieurs mètres de long alors que la moyenne de sa taille aujourd’hui est d’un mètre. Cela provoque par ailleurs un tout autre changement « nous avons là un organisme qui était avant le prédateur principal dans le système et qui est devenu aujourd’hui le proie d’autres organismes ». Une avalanche de conséquences donc.

Crédits photo (CC BY-SA 2.5) : Hans-Petter Fjeld

Les souris des parcs de New-York qui s'adaptent à la nourriture grasse

L’étude à été réalisée dans cette ville des États-Unis mais on pourrait probablement voir des résultats similaires dans d’autres pays. En gros, lorsque la ville de New-York s’est construite, les petits animaux présents se sont réfugiés naturellement dans les parcs. Contrairement à des souris « sauvages », ces souris des villes sont alors « capables » de digérer de la nourriture grasse comme des croutes de pizzas ou ce genre de restes trouvés au sol ou dans les poubelles. Mais elles peuvent également neutraliser les toxines qu’on peut trouver dans certaines noix moisies. Au même titre que les moustiques des métros de Londres, on a observé des différences de « signature génétiques » entre les souris de Manhattan, du Queens ou de Rockaway : grossièrement elles diffèrent selon le parc dans lequel elles vivent.

Crédits photo (CC BY-SA 3.0) : D. Gordon E. Robertson

On trouve quand même des preuves que l’homme provoque des changements chez ses petits voisins, et ce n’est généralement vraiment pas positif. Vous pouvez aller voir les animaux qui sont en train d’évoluer ou au contraire, les animaux qui n’ont pas du tout évolué depuis la préhistoire. C’est tout aussi bluffant.

Sources : National Geographic (1 et 2), BBC, Science Focus, La Presse.