En France, désigner des boucs émissaires peut devenir un sport national. La crise, Sarkozy, les gauchistes qui vont foutre le pays en vrac, Raymond Domenech... Pas facile d'accepter de perdre. Cet été, c'est Samir Nasri (et plus globalement toute la génération 87) qui s'y colle et qui donne au monde du football français et à son public raffiné et délicat l'occasion de déverser sa frustration sur une figure isolée. Le temps d'un été ou d'une éternité, elle fait office d'ennemi public numéro 1 et de défouloir officiel national. Quelques-uns ont enfilé ce costume avant lui. Et l'ont porté plus moins longtemps.
- Samir Nasri
Samir Nasri risque de devoir porter sur ses épaules maigrelettes le poids de la sortie de route sans gloire de la France lors de cet Euro 2012. Une attitude certes d'enfant un peu surdoué, un "ferme ta gueule" retentissant balancé à un journaliste, puis une autre insulte en zone mixte... Gallas aurait-il eu raison en 2008 ? Voilà désormais le joueur de Manchester City menacé affublé du costume de vilain petit canard du foot français, si ce n'est par celui de vilain petit connard par la foule en délire... - Nicolas Anelka
"Va te faire enculer sale fils de pute." (Nicolas Anelka, 31 ans, 70 sélections en Équipe de France). Un titre dévastateur de "L'Équipe" et une exclusion du groupe France plus tard, Anelka est suspendu 18 matchs par la FFF suite à son dérapage verbal, sonnant le glas de son histoire sous le maillot tricolore. Résultat: un exil chinois (en or) pour finir entraîneur-joueur et recevoir le soutien de Raymond Domenech. Monde de merde. - David Ginola
Un centre (très) mal ajusté dans les derniers instants du match, un contre éclair mené par une équipe dont la capitale est un nom de gonzesse, un bijou de Kostadinoooooov sous la barre et David Ginola devient un "criminel" pour Gérard Houiller. Pour le reste du public français, c'est juste un mec qui a les cheveux trop propres pour être honnête. Sifflé à chaque sortie il s'exile en Angleterre. Et poursuit Houiller en justice pour "injures publiques et diffamation", 20 ans après. Fallait pas l'inviter. - Christophe Dugarry
L'homme à la barbe d'une semaine, à la longue chevelure et au serre-tête salvateur, plus connu pour le public "comme le copain de Zidane là par hasard" ou "Dugachy". Ça n'empêcha pas le futur consultant star de Canal d'ouvrir le score lors du premier des Bleus au mondial, contre l'Afrique du Sud, et de tirer la langue à la France et à ses détracteurs... Le geste en a choqué certains. Mais ça, c'était avant Anelka. Et avant Nasri. Maintenant, ça fait un peu Bisounours. - Christian Karembeu
53 sélections en Équipe de France sans chanter la Marseillaise, ça agace le supporter de base qui répond à la question TF1. La faute a des phrases comme "il faut moins de Noirs chez les Bleus", aux essais nucléaires en Nouvelle-Calédonie... Si on ajoute à ça que sa femme de l'époque en faisait rêver plus d'un, Karembeu agaçe et ne jouit jamais de la sympathie du public français, qui le sifflait régulièrement. Champion du monde quand même. - Franck Ribéry
Un mondial 2010 complètement raté, un détour par un barà putesà filles faciles, une complicité trop affichée avec le pestiféré Anelka, une participation active à la "mutinerie" de Knysna, une prise en grippe du gendre parfait Yoann Gourcuff... L'année 2010 sera celle qui fera basculer Franck Ribéry du statut de chouchou du public français au mec moche que l'on injure systématiquement dès qu'il perd le ballon ou rate sa frappe, même à 40 mètres... En pleine rédemption depuis l'Euro en Ukraine. Bizarrement quand tu redeviens bon, c'est plus simple. - Eric Cantona
Un délicat "sac à merde" pour Henri Michel, une "bande d'idiots" pour les dirigeants du foot français, un high-kick pour un bovin de supporter qui l'insultait... Les débordements d'Eric Cantona sont au moins aussi frappants qu'est désolante la carrière en Bleu que "The King" aurait dû avoir... Le public bien-pensant hexagonal ne lui pardonnera pas ces dérives sur le moment, avant de se rendre compte plus tard, qu'on avait affaire à un génie. "You'll know you loved" disait Lou Reed... - Luc Sonor
Le rugueux Guadeloupéen nous apparaît beaucoup plus sympathique depuis qu'il a pris des sous à Jean-Michel Larqué à l'issue d'un procès en diffamation, le consultant s'étant un peu laissé aller en traitant Sonor de "pipe". Mais avant ça, Luc, c'est l'homme qui est dans tous les bons coups : un but contre son camp avec Metz face à Barcelone, un destin d'éternel second avec l'AS Monaco, une finale de Coupe de France annulée après le drame de Furiani, un passage chez les Bleus quand ils étaient au fond du trou entre 1987 et 1989 (une défaite contre Chypre) et une queue de cheval qui n'aura jamais été à la mode (et ne le sera jamais). - Vikash Dhorasoo
Un joueur de foot qui parle correctement, qui lit des livres et qui détruit le mythe de la franche camaraderie black-blanc-beur qui régnait en Equipe de France au cours des années dorées, on n'aime pas bien trop ça par chez nous! Et si en plus il a la fâcheuse habitude de dire ce qu'il pense de sa direction au point d'être licencié, c'est carrément de la provocation. Quand tu es footballeur, on te paie assez cher pour que tu renonces à toute dignité! Pour finir, il se met au poker, comme Domenech. Ce garçon a le diable dans la peau. Qu'est-ce qu'on va faire de toi, Vikash? - Hatem Ben Arfa
Véritable parangon de la victime toute désignée en cas de fiasco collectif, le petit Hatem s'est révélé grâce à des qualités de dribble remarquables. Et on va très vite lui reprocher de ne pas "murir", de ne pas se mettre au service d'une équipe, et de ne pas devenir un footballeur qu'il n'a jamais été. Si on ne veut plus de joueurs comme Hatem Ben Arfa dans le football, autant le leur dire quand ils ont 13 ans. Mais les repérer pour leurs qualités individuelles avant de leur reprocher leur manque de sens du collectif, c'est un peu con (on dit ça, mais bon, on est pas DTN, peut-être qu'il y a un plan plus subtil derrière...). - Didier Six
Il y a eu une époque où on était un peu moins fan du style de jeu allemand. Surtout à Séville en 1982. Alors que Six rate son péno face à Schumacher, il est sous contrat en Bundesliga où, dit-on, "il laissera un excellent souvenir"... A part ça, Didier Six participe à la relégation de l'OM en D2, mène une carrière de mercenaire et prend la nationalité turque et devient Dündar Siz. L'Allemagne, Galatasaray, Metz et Marseille, Ribéry devrait donc finir sélectionneur du Togo. - (bonus)Mickael Madar
Surement uniquement à cause du catogan. Donc ça ne compte pas vraiment.
Et vous, qui est votre footballeur souffre-douleur préféré ?