Manquer un jour de boulot c’est un événement un peu particulier dans ta vie, sauf si pour toi c’est une habitude parce que tu souffres d’une maladie chronique handicapante ou que tu aimes te la couler douce aux frais de la sécu. Là on parle de la petite grippe ou de la bonne gastro qui vont t’empêcher une fois tous les deux ans de rejoindre ton bureau et de vivre des moments d’allégresse autour de la photocopieuse avec tes collègues. Ta journée va s’organiser autour de 10 points précis auxquels tu ne pourras pas échapper.
6h00 : te réveiller en panique
Tu ouvres les yeux une heure avant la sonnerie de ton réveil avec l’impression que tu vas crever sur place dans ta sueur de personne malade. Gros problème, on est lundi et t’es censé(e) aller bosser. Tu sais que ça va être compliqué si t’as des vertiges toutes les deux secondes ou que tu passes ton temps à courir aux chiottes, mais t’es persuadé(e) que si tu appelles pour poser un arrêt tout le monde va te juger et penser que t’es encore sorti(e) tout le week-end et que tu n’assumes pas. La culpabilité est à son maximum.
7h30 : appeler ton boss
Bon, ton boss doit être réveillé à cette heure-ci. Après avoir hésité environ 30 minutes sur la meilleure manière de le prévenir entre l’appel, le texto, le sexto ou le mail, tu vas l’appeler parce que quand même c’est plus poli. Putain merde il vient de se réveiller, sa voix est encore plus dégueulasse que la tienne, tu vas être obligé(e) de surjouer ta maladie pour montrer que t’es vraiment dans le mal absolu. Finalement il est compréhensif et te parle comme si t’étais un petit koala qui souffrait, t’as vraiment eu peur pour rien encore une fois. « Repose-toi bien » qu’il a dit, toute ta culpabilité s’est envolée, tu vas même déjà un peu mieux, ton vomi est un peu moins acide, la douleur dans tes poumons est un peu plus douce.
8h00 : appeler ton médecin
Passage obligatoire si tu veux pas passer pour le plus gros mytho de tous les temps et que tu veux garder ton emploi (en plus de pas perdre trop de thunes), va falloir choper un arrêt maladie auprès de ton docteur préféré. Docteur qui va t’expliquer que t’as une gastro ou une petite rhino des familles alors que tu le savais déjà. Mais bon, il est gentil. Pas sa secrétaire, par contre, qui t’annonce qu’elle peut éventuellement te caler entre deux patients à 14h30 en te faisant bien comprendre que tu fais un peu chier ton monde à tomber malade aujourd’hui.
9h00 : tenter un nouveau dodo
Exercice compliqué après tous ces appels qui ont réveillé ton cerveau et avec ces nausées qui t’inspirent toutes les 5 minutes l’envie de décéder subitement. En plus ton lit est sûrement devenu le plus gros nid à bactéries de la région avec sa chaleur moite qui respire la maladie. Mais tant pis, tu rates quand même pas une journée de boulot pour ne pas essayer de rattraper deux-trois heures de dodo. Après une heure de demi-sommeil dégueulasse tu te réveilleras dans le même état qu’avant. Tant pis.
10h00 : dire à la Terre entière que tu es malade
Le problème quand tout le monde bosse sauf toi c’est que tu te sens un peu seul(e), alors qu’en ce moment précis tu as juste besoin d’attention et éventuellement d’amour. Donc tu envoies des dizaines de messages à ta mère, tes potes et même des inconnus sur doctissimo pour qu’ils reconnaissent ton statut de victime. La meilleure des techniques reste quand même le petit statut facebook « journée de merde + émoji triste » pour éveiller la curiosité de tes contacts. Au final, ta cousine à qui tu ne parles jamais mordra à l’hameçon en te demandant « se ki se pass ». Bien joué, tu vas pouvoir exposer ta situation.
10h55 : t'enjailler devant Motus
Au bout de même pas une heure, plus personne n’en a rien à foutre de ta souffrance. D’ailleurs tu souffres déjà beaucoup moins. C’est le moment de commencer à profiter de ton temps libre. Le truc con c’est que tu ne peux exécuter aucune tâche qui nécessite le moindre effort. Heureusement il y a Motus, l’émission regardée par tous les malades de France. Un festival de lettres, de mots, de boules noires et de Thierry Beccaro, l’activité parfaite.
12h00 : avaler des coquillettes avec du jambon
Le repas qui réconforte, avec du gruyère râpé qui fait des filaments sous l’effet de la chaleur intense des pâtes un peu trop cuites. Un vrai remède contre la dépression.
14h30 : aller chez le docteur
Le moment est arrivé. La petite salle d’attente avec ses affiches de prévention moches, avec ses gens qui patientent et qui ont sûrement des trucs bien pires que toi, et avec ses chaises, parce que sinon c’est relou d’attendre debout. Une fois que ton médecin t’a appelé t’as l’impression qu’il essaie de battre le record de la consultation la plus rapide du monde. En cinq minutes c’est torché, tu as en effet la fameuse rhino-pharyngite/gastro-entérite, toi même tu le savais déjà.
16h00 : passer à la pharmacie
Pour que la dame derrière le comptoir prenne ta consultation et disparaisse mystérieusement quinze minutes dans l’arrière-boutique. A son retour elle t’expliquera en détail l’utilisation de chaque médoc, surtout le doliprane que tu as pourtant déjà pris au moins mille fois dans ta vie.
17h00 : profiter de la vie
Voilà, plus aucune obligation pour aujourd’hui, tu peux retourner squatter ton lit et mater des séries en profitant de ton sirop pour la toux qui t’endort et te donne l’impression d’être un thug drogué à l’opium.
Puis demain tu retourneras au boulot, faut pas déconner.