Copa Mundial, World Cup, Weltmeisterschaft... De Tokyo à Tripoli, il n'est pas un footeux qui ne rêve de voir son équipe nationale lever un jour le trophée le plus célèbre du monde. En 2014, l'Espagne remettra son titre en jeu, sur les terres du Brésil, recordman du nombre de victoires en Coupe du Monde...En attendant l'événement planétaire footballistique le plus prestigieux de tous les temps, souvenons-nous, quelques instants, des éditions précédentes :
- 1970 au Mexique
Le vainqueur du siècle, le Brésil aux mille couleurs de Gerson, Tostao, Rivelino et du joueur du siècle, le roi Pelé. Le match du siècle, Italie-RFA en demie, cinq buts sur sept en prolongation et Beckenbauer au duel le bras en écharpe. La feinte de corps du siècle pour Pelé dans l'autre demie face à l'Uruguay. Le lob du siècle manqué d'un poil par le même joueur au premier tour. L'arrêt du siècle pour Gordon Banks sur une tête de qui vous savez. L'erreur de coaching du siècle pour Alf Ramsey qui sort Bobby Charlton à 2-1 contre la RFA en quarts et perd 2-3. La surprise du siècle aussi, avec l'absence de l'Argentine en phase finale. Le fair-play du siècle (cause à effet ?) avec aucun carton rouge récolté durant l'ensemble du tournoi. Bref, la Coupe du Monde du siècle, évidemment.
- 1982 en Espagne
On en avait rêvé, le Brésil l'a fait. Socrates, Zico, Eder, Falcao réinventent le foot et en auraient passé sept à l'Argentine si Serginho avait su faire un contrôle. Paolo Rossi flingue l'oiseau de feu, la Terre non italophone prend le deuil. Pendant ce temps, Robson montre à Ettori qui est Raoul, en 27 secondes. L'Algérie de Dahleb et de Madjer se paie la RFA puis se fait entuber par les cousins germains. La Hongrie en met dix au Salvador. Le Koweït fait un cheikh aux Bleus mais sombre quand même. L'Irlande du Nord, du grandissime Pat Jennings, tape l'Espagne chez elle à dix contre onze. Et puis, bien sûr, Séville. Schumacher, Trésor, Giresse, le retourné de Fischer, Bossis seul au monde au point de penalty, mythologie sportive dont on parlera encore dans cent ans. Les défaites aussi, sont légendaires.
- 1986 au Mexique
Deuxième service, il reste des cases à remplir. L'arnaque du siècle et le but du siècle à cinq minutes d'intervalle pour Maradona, l'arbitre tunisien du siècle pour Thierry Roland. Le show du siècle pour un France-Brésil (déjà) de légende, le match du siècle d'un gardien français pour Bats. La gnac du siècle, il faut l'admettre, pour les Allemands qui remontent deux buts en finale sur les lieux de leur immortelle demie de 70. Le ciseau du siècle pour Negrete contre la Bulgarie. Le carton rouge du siècle pour l'Uruguayen Batista après 45 secondes de jeu. Et aussi un Belgique-URSS qui vaut presque Italie-RFA, le Danemark qui en met six à l'Uruguay et en prend cinq face à l'Espagne au tour suivant. Pays hôte du siècle : le Mexique, pour l'ensemble de son oeuvre. Défense d'y retourner avant 2070, parce qu'il faut bien l'avouer, on a pas encore fini de savourer cette édition 1986...
- 1998 en France
Les yeux dans les Bleus, on a presque perdu de vue le reste de la compétition, qui a pourtant sacrément de la gueule. De nouvelles têtes sympa dans ce premier Mondial à 32 : la Jamaïque en mode Rasta Rockett, le Japon qui commence une belle série de présence en Coupe du Monde, des solistes à la pelle : Bergkamp et Owen façon Pelé, Beckham genre muay thai. Du suspense de première : le Nigeria qui sort l'Espagne dans le groupe de la mort, les Danois coeur de lion qui font vaciller le Brésil en jouant une mi-temps comme lui. Une demie Brésil-Hollande dont Thuram, Zizou et Manu Petit nous ont fait oublier quel monument ce fut. Suker et sa Croatie lance-flammes qui se paient l'Allemagne. La Hollande, elle, finit troisième et provoque elle aussi trois jours de beuverie nationale. Seule ombre au tableau, les hooligans d'Angleterre-Tunisie à Marseille. Mais bon, quand on a vu ça, on peut mourir tranquille. Tout à fait, Thierry !
- 1974 en RFA
Le crépuscule des dieux brésiliens sous des pluies de fin du monde et un RFA-Pologne dans la légende du water-polo. D'un côté, Johan Cruyff et ses Valkyries, la mer et le vent du football total qui enchantent la planète et balaie tout sur son passage. De l'autre, "Siegfried" Beckenbauer et la plus formidable Allemagne de tous les temps, pieds d'or et corps d'acier, discipline de fer et coeurs d'airain. Quatre-vingts secondes de jeu à Munich, penalty de Neeskens, les portes du Valhalla s'entrouvrent aux Oranges. Éblouis, ils n'ont pas vu "der Bomber" Gerd Müller déclencher la foudre... La coupe pour Kaiser Franz, l'or du Rhin pour les Germains. Vaillants mortels parmi les dieux, les Polonais de Lato et Gadocha qui terrassent les deux finalistes de 1970 pour terminer troisièmes. Du Wagner plutôt que de la samba. Question de goût : l'édition de 1974 demeure un véritable chef d'oeuvre.
- 1958 en Suède
Beautés nordiques et buts à pleins chargeurs, ambiance James Bond sous le pâle soleil scandinave. Au service pas si secret de Sa Majesté, les quatre équipes britanniques sont présentes en Suède, et ce pour l'unique fois de l'histoire. Et aussi, divines surprises, l'Italie à la trappe et des Bleus avec permis de tuer. Just Fontaine, l'homme au pistolet d'or, en met treize et nous envoie en demie. Fracture de la jambe pour Bob Jonquet sans remplacement autorisé, il faut vivre et laisser mourir face au Brésil. Rien que pour vos yeux, un extra-terrestre de 17 ans nommé Pelé finit le travail et donne leur première étoile aux Auriverde. Alors, papy, 58 ou 98 ? P'tit gars, c'est comme Daniel Craig et Sean Connery : le nouveau a fait plus fort au box-office mais l'ancien jouait bien mieux.
- 2006 en Allemagne
Une Coupe du Monde version primaire américaine : on change de favori chaque semaine et le plus vicieux gagne à la fin. D'abord l'Argentine, surdoué charismatique qui bat sa femme en secret : but après 27 passes contre la Serbie, volée d'anthologie de Maxi Rodriguez contre le Mexique, bagarre générale et défaite en quarts. Ensuite l'Allemagne, tout pour plaire (même du jeu, si si) sauf la science des coups tordus, battue en demie au bout de la prolongation par les incurables Italiens. Peut-être les Bleus de l'ineffable Ray ? Un candidat qui met des coups de boule comme Clinton des coups de (hum), les bien-pensants disent non en finale. Ne restent plus que les descendants de Machiavel pour décrocher la timbale. Heureusement pour l'humanité et pour le football, un seul mandat pour ces vainqueurs là.
- 1954 en Suisse
L'Everest des attaquants pour un frisquet Mondial entre Eiger et Cervin : 5,38 buts de moyenne par match, record absolu. Un petit tour et puis s'en vont pour les Bleus, on oublie vite quand la Hongrie de Puskas et Kocsis entre sur le terrain. Une sorte de Barça sauce paprika qui a passé 6-3 et 7-1 aux Anglais l'année d'avant et rosse tout le monde, Brésil compris, sur la route de la finale. Oui, mais une rafale de Kalashnikov n'a jamais arrêté un panzer... 0-2 après huit minutes plus l'esprit de corps modèle front russe et, dit-on, quelques piqûres modèle Tour de France, ça nous fait 3-2 et la coupe en Allemagne pour la première fois. Miracle de Berne outre-Rhin, drapeau en berne pour les fanas du beau jeu. Maintenant vous savez que le foot, c'est simple : 22 joueurs sur le terrain et tout ça tout ça.
- 2002 en Corée et au Japon
Loin des pelouses sacrées d'Europe et d'Amérique qui inspirent la crainte aux professionnels du ballon rond, les petits de la compétition se sentent pousser des ailes. Turquie, Sénégal, Corée du Sud, Japon, le XXIème siècle sera global ou ne sera pas. À part ça, pas de vrais grands matchs et une ribambelle de coups foireux. L'Italie poursuivie par un arbitrage bizarre (pour une fois...) contre la Croatie et la Corée du Sud. L'erreur qu'il ne fallait pas pour Oliver Kahn en finale, qui relâche le ballon dans les pieds du monstrueux Ronaldo, seule tâche au sein d'une carrière titanesque. La simulation la plus éhontée de l'histoire pour Rivaldo face aux Turcs. David Seaman au bêtisier des gardiens anglais contre Ronaldinho, Richard III en donnerait son royaume pour un Coupet. Quand même, un but en 11 secondes pour la Turquie, record battu. Et la défense de leur titre mondial par l'Équipe de France, dans tout ça ? Joker.
- 1966 en Angleterre
But ou pas but ? Une question pour l'éternité en point final d'une World Cup version Rollerball. Bulgares et Portugais se relaient à la savate pour envoyer Pelé à l'hôpital. Anglais et Argentins jouent le prologue de la guerre des Malouines. Russes et Allemands refont Stalingrad en demie au nom du vainqueur près. Robert Herbin, genou explosé par l'Anglais Stiles, se dit que les Bleus auraient mieux fait de ne pas se qualifier comme d'habitude. Entre les coups, on joue quand même, un peu. La Corée du Nord élimine l'Italie, mène 3-0 en quarts contre le Portugal et perd 3-5. La Hongrie bat le Brésil à la brésilienne mais s'incline face au grand frère soviétique, Brejnev fait rappeler les chars. Yachine, lui, n'a pas besoin du Politburo pour être le meilleur gardien de l'histoire. Mais quand même, avec ou sans Monsieur Bobby Charlton, les Anglais champions du monde, ça ne passe pas.
- Compétition-repoussoir : 1962 au Chili
On a longtemps hésité avec Argentina 78, batailles de l'ombre et résultats bizarres devant les verres fumés du dictateur grimaçant. La palme va finalement au dernier Mundial d'avant la TV en direct, en plein hiver austral d'un pays à peine remis du plus gros tremblement de terre de l'histoire récente. De l'anti-jeu, du béton et des coups partout. Un Chili-Italie où les Azzurri doivent quitter le terrain sous protection policière. Des stars déclinantes (Di Stefano), blessées (Pelé) ou en méforme (Yachine). 6000 spectateurs pour Tchécoslovaquie-Yougoslavie en demie, record absolu de l'indifférence. Seul Garrincha, petit oiseau au légendaire dribble à droite, survit à la marée noire. Pour les Bleus, une embrouille d'arbitre à Sofia et un barrage perdu contre la Bulgarie trente ans avant Kostadinov. Le Mundial où rien n'allait, on vous dit.
Et vous, vous le voyez comment, le Mundial 2014 au Brésil ?