Les chansons Disney, on les connait en VF, parce que c’est comme ça qu’on les a découvertes et qu’à 4 ans, l’anglais, en général, on le maîtrise pas trop quand on n’est pas anglophone. La plupart du temps, les traducteurs s’en sortent bien : ils doivent garder la sonorité d’une chanson, la mettre en accord avec l’animation, conserver le sens général de la chose et se démerder pour que ça marche. Mais parfois, ils abusent : maintenant qu’on comprend l’anglais, on s’en rend compte.
Le morceau de sucre - Mary Poppins
L’original : « That a spoonful of sugar helps the medicine go down »
La traduction : « C’est le morceau de sucre qui aide la médecine à couler »
Le seul hic, c’est que medicine, ça veut dire médicament, pas médecine. Si un morceau de sucre creusait le trou de la Sécu, on le saurait. On le saurait, pas vrai ?
Libérée, délivrée - La Reine des neiges
L’original : « No right, no wrong, no rules for me, I’m free »
La traduction : « Le bien, le mal, je dis tant pis, tant pis »
Donc, si je comprends bien, en France, les lois on ne les bafoue pas. On dit tant pis. Exemple : l’Occupation. Le bien, le mal, on dit tant pis, tant pis.
Un jour mon prince viendra - Blanche-Neige
L’original : « And wedding bells will ring, someday, when my dreams come true »
La traduction : « Les cloches sonneront l’union de nos coeur, un jour »
C’est pas un drame, mais on perd toute la dimension onirique du truc. Il n’y a plus de rêve, tout ça est terre à terre, et uniquement parce qu’on ne voulait pas perdre l’idée de mariage qu’on ne pouvait directement raccrocher par un adjectif aux cloches.
La chanson de la chenille - Alice au pays des merveilles
La chenille joue avec les voyelles. U = You, Y = Why, O = Oh, A = Ah, I = I. Du coup, toute la séquence est foirée, avec comme point d’orgue le « renoncez-igrec » pour placer des mots. Pendant la chanson, en français, la chenille dit des voyelles incompréhensibles, ce qui n’est pas le cas en anglais. La partie sur le crocodile est aussi mal traitée : dans la version originale, le crocodile « welcomes little fishes in, with gently smiling jaws », avec une idée de sourire inquiétant, là où, dans la VF, il se contente d’aller digérer sur l’onde opaline. C’est beaucoup moins menaçant.
Tout le monde veut dev'nir un cat - Les Aristochats
L’original : « Everybody wants to be a cat, because the cat’s the only cat who knows where it’s at »
La traduction : « Tout le monde veut dev’nir un cat, parce qu’un chat quand il est cat, retombe sur ses pattes. »
Dans l’argot du jazz, les cats, ce sont les joueurs de jazz, dans les caves, la nuit. Là, la traduction française ne veut rien dire. En plus, l’idée de retomber sur ses pattes n’a aucun rapport avec l’idée de connaître les bonnes adresses, les bons coins pour écouter du jazz, ce que sous-entend l’expression « to know where it’s at ». Et retomber sur ses pattes laisse entendre que le mec joue pas en swing mais sur le temps, ce qui même antinomique.
Il en faut peu pour être heureux - Le Livre de la Jungle
L’original : « Wherever I wander, wherever I roam, I couldn’t be fonder of my big home »
La traduction : « Je dors d’ordinaire sous les frondaisons, Et toute la jungle est ma maison »
D’après un sondage réalisé par Harris-Interactive, 0% des enfants de moins de 55 ans connaissent le sens du mot frondaison.
Sous l'Océan - La Petite Sirène
L’original : « Down here all the fish is happy / As off through the waves they roll / The fish on the land aren’t happy / They’re sad ’cause they’re in their bowl »
La traduction : « Chez nous les poissons s’fendent la pipe / Les vagues sont un vrai régal / Là-haut ils s’écaillent et ils flippent / À tourner dans leur bocal »
On peut pas parler de contresens, mais les poissons qui se fendent la pipe, j’aimerais bien les voir.
Ce rêve bleu - Aladdin
L’original : « A whole new world »
La traduction : « Ce rêve bleu »
A quel moment un tout nouveau monde devient un rêve bleu ? C’est l’histoire de Blanche Neige à l’envers, cette affaire.
Enfance brisée.