Ils ont beau être au centre de toutes les attentions en ce moment, ça n’est pas la joie pour nos hôpitaux. Manque de moyens matériels, manque de personnel, infrastructure bancale, surcharge de fréquentation, ce ne sont pas nos maigres applaudissements du premier confinement à 20h qui y ont changé grand chose.
La deuxième saison de la série Hippocrate est disponible depuis peu et nous plonge en plein dans les galères de l’hôpital français d’aujourd’hui. Un simple accident de canalisation oblige tout un service à se déplacer, incitant les internes à rejoindre les équipes urgentistes et forcément c’est pas joli joli. Thomas Lilti comme toujours dépeint un milieu médical en crise et montre comme personne le mal-être des soignants à qui on demande une charge de travail surhumaine dans des conditions franchement déplorables.
On avait adoré la première saison et notre sentiment se confirme en retrouvant cette fine équipe, alors en nous basant sur la série et d’autres sources, on va essayer de voir les deux trois petites choses qui se passent à l’hosto en France et qu’on n’aurait pas imaginé.
Certains disposent de caisson hyperbare
Bon alors là je dois vous avouer, GROSSE HALLU en découvrant cet objet dans la saison 2 d’Hippocrate. Vous avez la photo ci-dessous mais pour vous expliquer en deux mots, c’est un caisson de décompression. Quand on l’utilise on dit qu’on « plonge » ou qu’on « descend » car cette bulle va reproduire l’effet d’une plongée sous-marine sur le corps.
Pourquoi me direz-vous ? Eh bien quand on est intoxiqué au monoxyde de carbone (ce qui est le cas dans la série) par exemple, cette pression artificielle va permettre d’expulser plus rapidement l’air intoxiqué dans les poumons et donc de le remplacer par l’oxygène à l’aide d’un masque.
En gros, c’est un moyen de rééquilibrer rapidement le niveau d’oxygène dans le corps. Il peut aussi être utile pour les plongeurs qui remontent trop vite à la surface ou les personnes atteintes d’un mal des montagnes, mais seules les personnes dont le pronostic vital est engagé peuvent prétendre à cette séance hyberbare (rien à voir avec une séance où on se tape des hyperbares).
Les médecins étrangers sont rétrogadés au statut d'internes avec des salaires bas qui évoluent peu
« KEUUUUUA ? Mais c’est l’enfulette totale ? » me direz-vous. Ce à quoi je vous répondrai « Oui ». Ce à quoi vous répondrez une autre phrase, et nous échangerions ainsi main dans la main (enduite de gel hydroalcoolique) jusqu’à ce que mariage et infanticide s’ensuivent.
Revenons-en à nos moutons. Dans la saison 1 d’Hippocrate, Arben (Karim Leklou, qui ressemble vachement à Quentin de la rédac mais ça je pense que vous vous en retournez le uk) est un FFI (« faisant fonction d’internes »). Médecin diplômé d’Albanie, il ne peut prétendre qu’au statut d’interne pour exercer en France. Pas très cool si vous voulez mon avis (si vous ne voulez pas mon avis, appuyez sur la touche étoile). Alors même que les médecins étrangers sont essentiels à l’hôpital public, surtout en ce moment, et qu’ils remplissent exactement les mêmes fonctions que les collaborateurs autochtones il leur est très compliqué de s’inscrire à l’Ordre des médecins. Ils se tapent donc un salaire de zèr-mi proche de celui d’un salaire d’interne en première année.
Pour vous offusquer davantage je vous invite à lire cet article de Basta qui donne envie de chialer sa grand-mère (concrètement ça ne veut rien dire, pas plus que l’absence de reconnaissance des médecins étrangers).
Les services se démerdent pour se refiler les malades dont ils ne veulent pas aux autres services
Manœuvres qu’on voit mises en place dans les deux saisons d’Hippocrate. Compréhensible sur le principe, c’est souvent au détriment du patient qui a une maladie nulle que personne ne veut gérer. Un peu l’impression que c’est comme à l’école quand personne te choisit pour son équipe de foot.
En situation d'urgence on trie les patients
Grosse déprime cette info, même si on en entend parler de plus en plus depuis la pandémie qui force injustement des urgentistes à trier sur le volet.
Attention on ne parle pas d’un tri au pifomètre. Comme, de fait, on ne peut pas traiter tout le monde avec la même attention de soin aux urgences il faut mettre en place un protocole qui permet de décider qui bénéficiera en premier des soins. Cette situation est extrêmement bien expliquée dans la saison 2 d’Hippocrate.
Face à l’urgence, on doit « scorer » les arrivants, c’est-à-dire noter un certain nombre de critères qui permettra in fine de trier parmi les patients dont l’état de santé est le plus grave ceux qui pourront bénéficier du fameux caisson hyberbare susmentionné.
On vous conseille de ramener votre propre oreiller
C’est pas grand chose mais avant de rentrer en séjour hospitalier c’est mieux d’avoir des objets de votre quotidien pour favoriser votre sommeil (un patient qui dort bien, est un patient qui guérit mieux, sauf s’il est dans le coma et dans ce cas l’oreiller on s’en bat les steaks).
Mais n'y amenez pas tous vos bijoux et des liasses de billets
Même si ce serait un peu bizarre de faire ça, il est plutôt déconseillé de ramener des objets de valeur car à l’hôpital, les vols ne sont pas rares. C’est pas rassurant mais en même temps y’a koua que vous comprenez pas dans le concept d’hôpital public ? Bah c’est public quoi. Y’a du deu-mon. Rangez-moi cette bague 412 carats qui ne vous servira à rien pour l’opération de votre kyste rectal.
Quand on manque trop de place, on trouve des solutions peu orthodoxes
Comme le montre la série Hippocrate, face à l’urgence, il arrive qu’on se trouve obligé de trouver des solutions un peu claquées comme de mettre des patients souffrant de troubles psy dans une pièce fermée dont ils ne peuvent pas sortir. Une sorte de « boîte à fous » qui en principe leur évite de se faire mal ou de faire mal aux autres en attendant d’être traité.
Globalement le traitement des troubles psy n’est pas toujours évident car on a tendance à se dire que les hallucinations sont moins douloureuses qu’un coude cassé. En réalité et je pique la réplique à Chloé (Louise Bourgoin) dans la série « Il n’y a pas de différence entre les douleurs mentales et les douleurs physiques ».
On est totalement pris en charge mais certains services sont facturés donc restez stables
Avoir une chambre privée, Internet, les chaînes du câble… Tous ces petits avantages représentent un coût qui n’est généralement pas couvert par la sécurité sociale ni par votre mutuelle. Donc renseignez-vous avant d’exiger des fraises des bois au petit déjeuner et un Jeff Koons dans votre chambre (demande compréhensible uniquement parce que vous venez vous faire soigner d’une cataracte avancée qui vous a fait perdre la vue).
Infections nosocomiales no pasaran
Vous savez les infections nosocomiales ce sont ces trucs qu’on attrape à l’hôpital alors qu’on avait rien en arrivant sur les lieux. Il y en a pour tous les goûts (on a tous en tête le staphylocoque doré contracté par Guillaume Depardieu pendant son séjour à l’hôpital de Garches suite à un accident de moto) et plus le séjour à l’hôpital est long, plus le risque est élevé (logique en fait). En France l’OMS relève 4000 décès liées aux infections nosocomiales chaque année. Voilà pourquoi il est primordial d’avoir une hygiène parfaite durant tout ce séjour.
On note par exemple que les blouses des soignants ont beaucoup plus de chances de transporter des bactéries que les blouses jetables.
Les hôpitaux ont aussi des galères de punaises de lit
N’allez pas croire que dans un hopital vous serez épargné. Les punaises ne connaissent pas de frontières.
Tu peux demander une copie de ton dossier médical
On y pense pas forcément après un examen mais il est tout à fait possible de demander une copie du dossier. Dedans tu retrouveras tous les gestes médicaux qui t’ont été donnés, les médicaments, les résultats des analyses. ca ne te parlera pas forcément mais ça peut être utile de l’avoir sous la main pour ta santé à venir.
Les médecins ont beau être des pointures, il leur arrive de googliser des maladies
On vous en avait parlé dans les secrets des gens qui bossent aux urgences, mais les personnels soignants peuvent aussi avoir recours à Internet et c’est assez normal en somme. On n’a pas dit qu’ils allaient vous diagnostiquer un cancer en consultant Doctissimo calmez-vous.
C'est malheureux mais la plupart des gens qui viennent aux urgence n'ont pas vraiment besoin de venir aux urgences
Par exemple, la cousine d’une amie de la voisine d’une de mes collègues est déjà allée aux urgences pour un tampon oublié. Bon alors en soi ça aurait pu être beaucoup plus grave. Et puis elle avait 20 ans, elle était jeune et naïve. Bref tous les gens qui débarquent aux urgences n’ont pas des doubles fractures ouvertes après défenestration d’un immeuble de 18 étages. La plupart du temps c’est tout pourri, mais ça bien sûr on évite de le dire aux gens quand ils arrivent. L’important à retenir c’est qu’il vaut mieux éviter d’aller aux urgences quand on peut. Genre ne va pas aux urgences parce que t’es enrhumé quoi.
Les erreurs médicales représentent une importante proportion de décès
Une étude américaine ultra flippante aurait même montré que les erreurs médicales serait la troisième cause de mortalité aux Etats-Unis avec 250 000 décès par an à l’hôpital. Il semblerait que cette étude soit sujette à critique, mais ça n’enlève rien à la réalité des erreurs médicales. Après, j’ai envie de vous dire : que peut-on y faire ? Supprimer les hôpitaux ? Bah non, patate. Les hospitalisations représentent un risque, certes, mais un risque qu’on est tous prêt à prendre pour ne pas passer l’arme à gauche.
L'usage de sangsues est de moins en moins marginal
Et parfois il se passe des trucs chelous comme ça, une sangsue qui se fait la malle, ce qui constitue certainement une des choses les plus insolites vues dans un hôpital.
Il existe des simulateurs de toucher rectal
Et on a vachement hâte que la saison 3 d’Hippocrate en parle.