Y’a des mecs qui réussissent à avoir le totem d’immunité sans jamais gagner les épreuves qualificatives. Des gens qui n’hésitent pas à massacrer les autres gens qui les gênent tout en se prémunissant contre tout procès ultérieur. En temps de guerre, la moralité, c’est fluctuant, hein ? Et bah après la guerre aussi.
Omar el-Béchir
Mis en accusation par la Cour pénale internationale pour crimes contre l’humanité en 2008, Omar-el-Béchir, président du Soudan depuis 1989, continue tranquillou d’exercer ses fonctions. C’est la première fois dans l’histoire qu’un chef d’Etat en activité est accusé de faits aussi graves. Après son coup d’Etat mené en 1989 et la dissolution pure et simple de tous les opposants, el-Béchir s’est rendu coupable de crimes d’une rare violence au Darfour, où la guerre civile dure depuis 2003 dans une indifférence générale. 300.000 morts quand même. Les Etats-Unis ont qualifié la situation de génocide contre trois groupes ethniques. Malgré le mandat d’arrêt international courant à son encontre, el-Béchir poursuit ses visites internationales tranquillement et n’a pas été arrêté par les autorités successives de la Libye, du Qatar, de l’Égypte, du Tchad, de Djibouti, du Kenya, de l’Afrique du Sud et de la Chine.
Heinrich Mückter
Alors qu’il essayait de s’enfuir de Cracovie, Mückter a été récupéré par les Américains en 1945 dans le cadre de l’opération Paperclip qui visait à récupérer les scientifiques nazis pour les incorporer contre immunité aux unités de recherche américaines. Pendant sa période nazie, Mückter expérimentait l’injection de virus à des prisonniers dans les camps. Sauf qu’une fois aux Etats-Unis, il a commercialisé avec l’entreprise Grünenthal un médicament, la Thalidomide, qui ne servait à rien et qu’on destina logiquement aux femmes enceintes puisqu’il ne servait à rien. On ne respecta pas les procédures de test : pub massive, pas besoin d’ordonnance, diffusion mondiale sous plein de licences différentes. On estime à 15.000 le nombre total de victimes, le médicament occasionnant des malformations congénitales. Bravo Mumu.
Shiro Ishii
1-2-3 mec sympa :
Shiro Ishii était le chef de l’Unité 731. Créée sous l’empire japonais, cette unité était officiellement censée travailler sur des projets de purification de l’eau, mais organisait en réalité des tests bactériologiques sur des cobayes humains : prisonniers politiques, opposants au régime, puis soldats chinois et russes une fois la guerre bien entamée. Atrocités absolues. Mais mais mais : Ishii sort la carte « pacte avec les Etats-Unis » pour éviter tout jugement et reçoit une pension à vie contre divulgation de ses recherches aux Américains.
Hubertus Strughold
Récupéré lui aussi par les Américains à l’issue de la Seconde guerre mondiale, le docteur Hubertus Strughold était soupçonné d’avoir activement participé (entendez superviser) des expérimentations médicales au camp de Dachau. En gros, il s’agissait de mesurer la réaction des corps au froid en plongeant des prisonniers en hypothermie jusqu’à ce qu’ils en meurent ou que leurs organes gèlent. Outre ces petites broutilles, il avait aussi conduit des expérimentations similaires avant la guerre sur des enfants atteints de maladie psychiatrique. Mais Strughold a pu tranquillement continuer sa carrière aux Etats-Unis en travaillant sur les premiers programmes spatiaux.
Edgar Ovalle Maldonado
Pendant la guerre civile guatémaltèque, Edgar Ovalle Maldonado a commandé une unité responsable de 77 massacres dans la région de Quiche. A la fin de la guerre civile, il a bénéficié d’une immunité contre toute poursuite par deux fois contestées au cours de procédures finalement déboutées. Il est actuellement député.
Wernher von Braun
Comme Strughold, von Braun a terminé sa carrière auprès de la NASA, participant activement à la construction de la fusée Saturn V. Sous le régime nazi, il était responsable du programme de développement des missiles V2, lesquels étaient fabriqués dans des camps de concentration par des prisonniers qui mouraient évidemment. La vie de von Braun a inspiré le scénario du Dr. Folamour, de Kubrick, une dénonciation du programme Paper Clip qui visait à amnistier les criminels de guerre nazis pour bénéficier de leur savoir-faire technique.
Ieng Sary
Vice-Premier ministre et ministre des affaires étrangères du gouvernement khmer rouge, entre 76 et 79, Ieng Sary était chargé d’organiser les purges au sein de son ministère. Après des années de guérilla et d’exil faisant suite à la chute du régime, il négocie son ralliement au gouvernement en 1996 contre l’immunité et le pardon accordé par le roi. En 2007, il est toutefois arrêté pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre. Mais le procès n’aura jamais lieu, Ieng Sary ayant le bon goût de mourir peinard en 2013 avant la fin des procédures préalables.
Augusto Pinochet
Pinochet est un mec qui, à chat perché, serait resté perché tout le temps même quand il l’était pas parce qu’il aurait préalablement changé les règles du jeu. Pour faire simple, afin de maintenir le régime autoritaire qu’il dirigeait après son coup d’Etat de 1973 ayant conduit au « suicide » du président Allende, il a tué et torturé plus de 30.000 personnes, s’arrangeant pour superviser lui-même la transition démocratique de manière à s’auto-accorder l’immunité par voie constitutionnelle. Finalement arrêté à Londres en 1998 en raison du mandat d’arrêt international courant à son encontre, il s’arrange pour ne jamais être jugé en raison de sa santé défaillante.
Raoul Cédras
Chef de la junte militaire haïtienne qui effectua un coup d’Etat en 1991, Raoul Cédras est directement responsable du massacre de Raboteau ayant conduit à l’assassinat de 50 partisans du président renversé, Jean-Bertrand Aristide. Cédras n’est pas officiellement poursuivi pour crime contre l’humanité mais a été condamné à la prison à perpétuité par la justice haïtienne pour les exactions qu’il a commises. Mais ça va, puisqu’il est réfugié au Panama, qui refuse de l’extrader.
Uhuru Kenyatta
Jugé par la Cour pénale internationale pour crime contre l’humanité et crimes de guerre suite aux violences post-électorales après les élections de 2007-2008, Uhuru Kenyatta, actuel Président de la République du Kenya, a bénéficié d’un non-lieu. En cause des cas évidents de pression et de menaces pesant sur les témoins et ne permettant pas à l’enquête d’aboutir. Depuis cet épisode, Kenyatta bénéficie d’une relative tranquillité que sa position actuelle renforce encore, puisqu’il bénéfice désormais de l’immunité dévolue aux chefs d’Etat.
Amnesty International milite pour que les législations européennes et surtout françaises soient modifiées de manière à permettre l’extradition des chefs d’Etat et délégataires officiels faisant l’objet de mandats d’arrêt internationaux pour crime contre l’humanité. On s’étonnera tout de même que le faux présentateur du spot suivant ressemble vachement à Thierry Beccaro.
Source : Listverse