L’engagement des chanteurs n’a pas toujours donné que du bon. On se souvient avec commisération du Live Aid, et nos oreilles saignent encore régulièrement à l’écoute des jérémiades de Bono sur la paix dans le monde. Mais quelques fois, quelques fois, art et politique font bon ménage, et le rocker sait se muer également en porte parole des faibles, des opprimés, des laissés pour compte sans sombrer dans le ridicule. La preuve avec ce top 10 des chansons engagées (hors France, mais ce sera pour bientôt).
- Catégorie jazz : Billie Holiday – Strange Fruit
Le fruit étrange est celui des « nègres » victimes de lynchages dans le sud raciste et arriéré de l’Amérique des années 30. La chanson enregistrée sur un petit label (Columbia Records refusant de la publier) allait connaitre un destin extraordinaire en devenant un des hymnes officieux du mouvement des droits civiques.
- Catégorie rap : Grandmaster Flash – The Message
On aurait pu choisir Fight The Power de Public Enemy ou Fuck Tha Police de NWA, mais honneur aux ancêtres avec le mythique The Message, description sans fard mais aussi sans pathos de la vie dans le ghetto.
- Catégorie reggae : Peter Tosh – Legalize It
Bon évidemment, avec un titre et une pochette comme cela, on ne peut ignorer la nature (et nature est le bon mot) de l’engagement de l’ancien acolyte de Bob Marley.
- Catégorie folk : Bob Dylan – Masters Of War
Certains lui préféreront l’archi-repris Blowing In The Wind (d’ailleurs sur le même album), mais la charge dénonçant les marchands d’armes, au texte d’une sourde violence et à l’interprétation d’une rare froideur, est un des sommets de la chanson folk des années 60.
- Catégorie soul : Edwin Starr – War
éWar, huh, yeah/What is it good for/Absolutely nothing/Uh-huh/War, huh, yeah/What is it good for/Absolutely nothing". Evidemment, dit comme cela...
- Catégorie ovni : Jimi Hendrix – The Star Spangled Banner
La plus belle version du Star Spangled Banner (avec celle de Marvin Gaye au All Star Game de la NBA en 1983). On connait l’histoire : au matin du 18 aout, le gaucher de Seattle clôture le légendaire festival rock, devant les quelques milliers de hippies restants (probablement pas les plus sobres), avec un déluge de distorsion et de larsen. Sa six cordes déstructure l’hymne US en imitant les bombardements américains et le survol des hélicoptères, sur le Vietnam de 1969.
- Catégorie funk : Sly And The Family Stone – Everyday People
Evidemment, un James Brown affirmant la fierté d’être noir aurait fait l’affaire, mais on a une tendresse toute particulière pour ce magnifique hymne à la tolérance. Il est vrai que Sly Stone avait une belle peau ébène, et des narines couleur ivoire.
- Catégorie hippie : Buffallo Springfield – For What It’s Worth
Initialement dénonciation de la violence policière sur la jeune californienne, la chanson de Stephen Stills est ensuite devenue le symbole de la lutte contre la guerre du Vietnam, par la grâce (notamment) des ces vers immortels : « There's something happening here/What it is ain't exactly clear »
- Catégorie punk : MC5 – Kick Out The Jams
Les harangues hallucinées de leur gourou-manager-producteur le disaient bien « Si vous ne faites pas partie de la solution, vous faites partie du problème ». « Kick Out The Jams Motherfuckers ! »
- Catégorie inattendue : Elvis Presley – The Ghetto
Elvis n’était pas politisé, n’avait surement aucune idée d’où se trouvait Saigon, trouvait visiblement tout le monde très sympathique (et dans tout le monde, il y a Richard Nixon). Mais le King a chanté une des plus belles protest-songs qui soit.
Et vous, vous en voyez d'autres ?