Alors comment elle fut cette décennie au niveau rock ? Retour du rock à guitares (Strokes, Libertines...). Explosion de l’Americana (Wilco, Vic Chesnutt, snif...) parfois jusqu’à l’indigestion. Reformations (New York Dolls, The Stooges...) dans la plupart des cas plus convaincantes sur scène que sur disque (quand il y a eu disque). Pas de « grands » mouvements comme dans les années 90 avec la Britpop (oui pour moi la Britpop des années 90 c’était grand), mais quelques ovnis sortis dont ne sait où, et qui feront peut être florès (il y en a quelques uns dans ce top). Et donc pour illustrer tout cela, le top des 10 meilleurs albums rock de la décennie 2000-2009 d’après moi (et c’est déjà pas mal).
- White Stripes – Elephant : Ok, le mec est laid comme un pou et fort comme un turc (vous avez vu ses bras ? Y a pas que des guitares qu’il doit soulever). Ok, la petite est aussi utile derrière une batterie, qu’un phoque dans une quincaillerie (et je vous jure qu’un phoque dans une quincaillerie cela ne sert à rien). Ok. Mais reconnaissons que le duo noir, blanc, rouge a sorti le meilleur disque de ses 10 dernières années, en revisitant avec fougue et panache le blues des années 20 et 30, lorsque la plupart de leurs concurrents ne remontent pas beaucoup plus loin que les années 60 (quand ils savent qu’il y a eu de la musique avant Aerosmith).
> Morceau à écouter : Seven Nation Army. L’hymne absolu des années 2000, et hélas des footeux, des ventres à bière, et surement de votre petit cousin de 6 ans qui ânonnent régulièrement : « Ta Tata Tata Ta Ta ».
- Amy Winehouse – Back to Black : Ok, elle ressemble à une pute moldave au sortir d’une semaine du nouvel an avec des oligarques russes à Méribel. Ok, elle picole plus qu’un régiment de para en perm pour deux jours dans une station balnéaire, après 6 mois de trek en Afrique australe, et elle confond en concert son micro avec son verre. Ok. Mais reconnaissons que la diva cocaïnée et permanentée est la plus belle voix de la décennie et que son deuxième album regorge de pépites ska et soul, comme au meilleur des années 60.
> Morceau à écouter : Rehab. Parce que cela dit tout.
- Queens of the Stone Age – Songs for the Deaf : Ok, ils ont un nom merdique. Ok, c’est bourrin, ça pue le mâle viril à 100 kilomètres et la testostérone mal dégrossie (je ne sais absolument pas ce que cela veut dire). Ok. Mais le gang de Josh Homme rejoint ici par Dave Grohl aux fûts, a sorti avec son troisième album un authentique chef d’œuvre, comme le hard rock (en est-ce vraiment ?) n’en donne que tous les 15 ans.
> Morceau à écouter : No One Knows. Pour la partie de batterie démentielle de l’ancien Nirvana, qui scotche sur son siège des mecs comme moi qui ne font que taper sur des bambous et ne jouent pas les requins (qu’est qu’il a bien voulu dire ?)
> Pas dispo sur les sites de streaming légaux - Acheter l'album
- Johnny Cash – American IV : The Man Comes Around : Ok, la voix n’est plus ce qu’elle était. Ok, c’est un peu malsain d’écouter un mec qui va crever. Ok. Mais le choix des reprises de l’homme en noir est impeccable, la touche du sorcier Rubin vraiment envoutante, et les invités (Nick Cave notamment) classes et discrets.
> Morceau à écouter : Hurt. Pour vraiment savoir ce que cela fait de souffrir et pour son clip cadavérique et démentiel.
- Arcade Fire – Funeral : Ok, alors que les White Stripes (comme les Beatles maintenant d’ailleurs) n’ont besoin que d’être deux pour vendre des disques et remplir les salles, les Arcade Fire s’emploient à sept, comme des nains, des mercenaires, des samouraïs ou des péchés capitaux. Ok, ils sont québécois cette région toute pourrie qui nous a donné tant de chanteurs merdiques. Ok. Mais ce joyeux bordel culmine sur ce Funeral étincelant, et onirique, qui nous emmène dans un maelstrom irradiant d’une beauté pure et abstraite comme seuls savent l’être les moments d’amour sans pudeur (si quelqu’un comprend ce que j’écris, qu’il me prévienne).
> Morceau à écouter : Wake up. Parce que c’est là-dessus que U2 faisait son entrée sur scène lors de son avant dernière tournée. Autant dire le meilleur morceau de la soirée.
> Pas dispo sur les sites de streaming légaux - Acheter l'album
- Bob Dylan – Love and Theft : Ok, il est vieux, ratatiné, sclérosé, déglingué... Ok, il chante comme Donald duck essayant d’imiter Daffy duck. Ok. Mais tant que le Zim sortira des albums de cette trempe, et qui plus est un 11 septembre 2001, le natif du Minnesota demeurera le plus grand.
> Morceau à écouter : Sugar Baby. Pour un grand classique du grand Bob, la ballade crépusculaire, qui fait chialer dans sa bière, et qui clôt l’album en se faisant poser cette simple question : « Elle est où la concurrence ? Hein, elle est où ? »
> Pas dispo sur les sites de streaming légaux - Acheter l'album
- LCD soundsystem – LCD soundsystem : Ok, il est gras, bedonnant, mal rasé. Ok, il a un jeu de scène entre l’épileptique qui aurait trop joué à Doom, et le homard pris dans l’épuisette du cuistot du restaurant de fruits de mer, où vous vous êtes rendus pour fêter la St-Valentin. Ok. Mais le funk-punk-dance-groove (tout ça, tout ça) de James Murphy le cofondateur du label DFA, vous fera frétiller en toute circonstance, avec ce premier album détonnant et étonnant (c’est beau quand deux mots qui se ressemblant se suivent n’est ce pas ?)
> Morceau à écouter : Tribulations. Pour son rythme hypnotique et pour s’entendre hurler : « Everybody makes mistakes/but I feel alright when I come undone. »
- Radiohead – Kid A : Ok, ils ont arrêté d’écrire des chansons depuis dix ans pour ne travailler que sur les sons. Ok, ils sont sexys, comme un guichetier du pôle emploi un jour de crise. Ok, ils nous les cassent un peu avec leur trip écolo : « On fait de la musique sans trouer la couche d’ozone ». Ok. Mais il faut bien le reconnaitre les quatre d’Oxford et leur leader rachitique restent le meilleur groupe de rock du monde, le plus novateur et intéressant en tout cas, comme le prouve l’inattendu successeur du multi-platiné Ok Computer.
> Morceau à écouter : How to Disappear Completely. Parce que c’est juste leur meilleur morceau tout album confondu.
- Great Lake Swimmers – Ongiara : Ok, dans cette liste ils font un peu tâche, vu que s’ils remplissent ma cave pour leur prochaine tournée, on parlera de succès. Ok, c’est de la musique de cow-boy, et même bonne cela reste de la musique de cow-boy. Ok. Mais le groupe canadien a sorti en 2007 et dans une relative indifférence, le plus bel album de country moderne (je ne sais pas vraiment ce que cela veut dire, je suppose que cela correspond à de la musique jouée par des gens, qui sont trop jeunes pour avoir connu des indiens) de la décennie. Un authentique chef d’œuvre. Tout simplement.
> Morceau à écouter : Your Rocky Spine. Pour son balancement équestre, qui donne envie de quitter Paris pour les plaines du Nouveau Mexique en quête d’un jeune veau de 3 ans, pour lui ligoter les pattes au lasso. Et y a pas beaucoup de morceaux qui donnent envie de faire cela.
- Daniel Darc – Crève coeur : Ok, en plein débat sur l’identité nationale, la présence d’un français dans les dix meilleurs disques de la décennie écoulée, sent à plein nez le « Sarko, Sarko moi aussi je veux un ministère, ou une mission en Antarctique pour aller faire chier les pingouins. Tant que c’est payé, et qu’on peut faire la bise à Rama Yade ». Ok, le bonhomme fait parfois un peu peur avec ses tatouages, son protestantisme austère, et son côté destroy. Ok. Mais voici tout simplement la résurrection du plus grand parolier français actuel, arrangée avec classe par un Fréderic Lo au summum de son art.
> Morceau à écouter : Psaume 23. Parce qu’après avoir écouté cela si vous ne foncez pas vous convertir bande de mécréants, vous serez damnés éternellement. Amen.
Et vous, quels sont vos albums Rock préférés de la décennie ?
Voir aussi le top des meilleurs albums de la décennie 2000-2009 sur le fantastique site Acclaimed Music
Top écrit par EBR, topiteur rock, et ami du Québec Libre