C'est un des grands tabous d'internet. Nous avons tous, en nous promenant sur le web, souri à la vue d'un de ces chats qui pullulent sur la toile, tantôt maladroit, tantôt mignons, tantôt facétieux, ces "lolcats" sont les stars du web, au point de faire partie du paysage numérique partout dans le monde. Mais connaissons-nous vraiment ces chats? Qui sont-ils? Comment sont-ils recrutés? Combien gagnent-ils? C'est face à ces questions que nous avons démarré notre enquête, à la rencontre de ces félins à la vie trépidante.
"J'ai mis Pompon sur Youtube, il jouait avec une balle, mais il n'a fait que 17 vues en 24 heures... alors je l'ai fait piquer". Corinne, 36 ans, pensait que son chat allait, lui aussi, enflammer la toile et qu'elle ferait fortune en filmant ses exploits. Ils sont plusieurs milliers, chaque jour, à espérer accéder à la gloire par ce biais et l'immense majorité de ces réalisateurs amateurs tombe de haut. Pour certains, "c'est la faute à Youtube", et le marché du lolcat, "c'est magouille et compagnie". Et effectivement, ce métier dans lequel il y a beaucoup d'appelés et peu d'élus exige un carnet d'adresses imposant et des risques parfois inconsidérés.
Une solide formation.. et un bon réseau
N'est pas lolcat qui veut : les stars du web aujourd'hui sont toutes passées par des moments de doute, certains chats ont même été contraints, pour manger, de faire des cascades dans le métro, pour une brique de lait ou un ticket restaurant. Mais tous l'affirment : devenir un lolcat, ça s'apprend. Si les premiers se sont fait les griffes sur le tas, la nouvelle génération sort des meilleures académies de chat, où une condition physique irréprochable est demandée.
Mais cette préparation ne suffit pas : il faut parfois un coup de chance, quand ce n'est pas un coup de pouce. Youtube serait ainsi soupçonné d'avoir truqué un appel d'offre pour plusieurs centaines de vidéos de chats afin de favoriser la famille de Grumpy Cat, considéré comme "le parrain" dans le milieu.
Une fois ces conditions réunies, il est possible de faire un coup d'éclat avec une ou deux vidéos. Mais de l'avis de tous, c'est à ce moment-là que le plus dur commence.
"J'étais prêt à me foutre en l'air pour quelques vues"
Nous avons rencontré Martial, un chat annoncé comme une valeur montante du Lol. Après des débuts remarqués, le succès semble le fuir, Martial ne fait plus rire personne et certains commentaires sur sa chaine font plus mal que d'autre : "casse-toi, t'es has-been"... "Old!"... "Fake!"... Le jeune félin sombre dans l'alcool et va à chaque vidéo un peu plus loin pour regagner le cœur de ses fans. Martial perdra une patte dans cette course à l'audience, victime de la tyrannie des modes qui passent.
Martial, Hercule, Fifou... la liste est longue, tous ont laissé dans cette course à l'audience leur santé quand ce n'est pas leur vie. Le succès est une drogue qu'il faut pallier quand l'internaute se détourne de leurs facéties, et ces chats deviennent parfois de véritables débris félins
L'arrivée de la concurrence chinoise
Cette guerre que se livrent les chats dans la course à l'audience ne laisse personne indemne. Et pendant que des félins se détruisent pour satisfaire une demande sans cesse grandissante, la concurrence asiatique pointe son nez et propose à son tour du LOL à moindre coût. Des productions chinoises, à base de "lolpandas" envahissent les plateformes vidéos, avec des animaux parfois mineurs et dont les conditions de travail sont régulièrement dénoncées par les ONG. Face à ces animaux particulièrement mignons et peu couteux, nos chats occidentaux se retrouvent bien souvent sur le carreau, ne pouvant rivaliser sur les couts de production de leurs vidéos.
Les lolcats, toujours superstars du web mais clairement sur le déclin, ne paieraient-ils pas aujourd'hui le prix de la mondialisation ? La guerre n'a donc pas fini de faire rage dans le monde du LOL animal, mais à quel prix ? La prochaine que vous voyez un chat tomber d'une chaise sur Youtube, pensez-y: nous consommateurs sommes aussi un peu responsables...
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